Après Siné et bien d'autres en France, un antisémite de plus. Celui ci nous vient de Grande Bretagne après avoir vécu en Afrique du sud où il a connu l'apartheid. Quand il s'esprime sur la Palestine, il possède donc une source de comparaison parfaitement fiable quand il s'agit d'évaluer le niveau d'oppression.
Cet antisémite se nomme Derek Summerfield et ce n'est pas un dessinateur de talent comme Siné mais un psychiatre réputé dont un des chevaux de bataille est l'éthique du corps médical.
Il est intéressant d'observer que la réflexion de D. Summerfield est globale, nullement limitée au conflit palestino-sioniste. Ce dernier lui sert, comme il le dit lui-même, d'exemple type où un système oppressif recourt à la torture en bénéficiant de l'assentiment et des services de la corporation médicale. Ainsi, loin de tout angélisme, il signale l'existence d'une torture à caractère endémique en Egypte. Il est d'ailleurs remarquable qu'Al-Ahram ait pu publier cette remarque du Dr Summerfield. Il est vrai qu'il s'agit d'une édition anglophone donc guère consultée par les citoyens Egyptiens, n'empêche qu'à mon avis la journaliste qui a réalisé l'entretien va certainement se faire taper sur les doigts.
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Al-Ahram Weekly (Egypte) 14 août 2008 traduit de l'anglais par Djazaïri
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Quand un médecin est-il un médecin ? Et quand est-il un citoyen ?
Cela fait plus de dix ans que le psychiatre Britannique Derek Summerfield a appelé au boycott universitaire d’Israël dans le domaine médical. Ayant grandi en Afrique du sud, fils d’une Zimbabwéenne Afrikaner et d’un père Britannique, il sait trop bien ce que signifie la discrimination raciale. Il l’a vécue.
Avant même de visiter les territoires palestiniens vers la fin de la première Intifada (1987 – 1992), où il vit de ses yeux la torture systématique et institutionnalisée des Palestiniens par Israël, Summerfield «avait toujours été fâché contre Israël.»"
«Lors de ma première journée à Jérusalem, voir le comportement de jeunes soldats israéliens à un check point envers un vieil homme Palestinien m’a semblé quelque chose de très familier, » dit-il. Je voyais ce genre de choses en Afrique du sud où j’ai grandi. »
Summerfield a consacré ces seize dernières années à faire connaître les crimes de guerre israéliens et à publier dans les plus grandes revues médicales britanniques de sévères critiques de la complicité des médecins Israéliens. Aujourd’hui, le nom de ce professeur honoraire au London Institute of Psychiatry et professeur associé au Refugee Studies Centre de l’Université d’Oxford, revient souvent dans le très discuté boycott britannique des échanges avec les universités israéliennes. Comme il est médecin, son approche et son militantisme se sont focalisés sur l’aspect médical de la campagne de boycott pendant laquelle il a mis en question de manière convaincante la responsabilité morale et éthique du corps médical. Il est l’ennemi public N°1 pour les groupes de pression juifs au Royaume Uni, et pour l’Association Médicale israélienne (AMI), parce qu’il pose les bonnes questions.
« J’ai toujours été un médecin intéressé par les droits de l’homme et par des problèmes plus larges et on devrait dire que les médecins ont autant la responsabilité de s’exprimer sur les causes politiques et sociales de la détresse et de la maladie que de soigner des individus, » a-t-il déclaré à Al-Ahram Weekly au cours d’une récente visite de deux jours au Caire. Summerfield a été invité à prononcer la conférence annuelle Okasha, un événement organisé par les plus éminents psychiatres Egyptiens, Ahmed Okasha, Farouk Lotaief et Mohamed Ghanem. Il a choisi de parler des droits de l’homme et de la responsabilité du corps médical.
L’intérêt de Summerfield pour la question palestinienne remonte à loin. Alors qu’il travaillait à la Medical Foundation for Victims of Torture à Londres au début des années 90, il rencontra de nombreux patients palestiniens qui avaient été torturés par des soldats Israéliens. Et au cours de sa première visite dans les territoires palestiniens occupés, il devint clair pour lui qu’Israël avait depuis longtemps adopté la torture comme « politique d’Etat. » Déjà à l’époque, Gaza était « mal en point mais bien moins qu’en ce moment.»
Summerfield s’est alors impliqué dans le Community Mental Health Programme de Gaza.
«J’étais à Gaza le jour où le soi-disant processus de paix a été signé à Oslo en août 1993 et c’était très intéressant parce que la plupart des gens que je connaissais étaient incroyablement heureux. Ils pensaient que c’était la fin de tout ça. Mais une minorité de Palestiniens disaient – et ils se sont avérés avoir raison – que ce n’était pas un bon accord, qu’ils étaient pessimistes et que Yasser Arafat ne savait pas ce qu’il avait signé.»
Ce qu’il a vu – « le crime le plus ignoble a été minimisé ici par un pouvoir colonial qui se considère comme faisant partie de l’Europe. Ils s’emparaient de terres palestiniennes et les torturaient de manières qui rappelaient l’Afrique du sud mais, comme il s’est avéré, bien pires qu’en Afrique du sud » -- l’a obligé à s’impliquer activement dans le problème palestinien.
Ayant été témoin des deux Intifadas, Summerfield déclare que dans la deuxième, la conduite des forces israéliennes d’occupation a été « bien plus ouvertement brutale et que les grandes puissances n’ont rien dit du tout.»
« Il fut un temps » dit-il, « où avant de lancer un raid les chefs militaires Israéliens discutaient de comment il serait perçu en Europe et aux Etats-Unis. Ils ne s’embêtent plus avec ça maintenant. Et clairement, la torture était un problème important pour ces pays. »
Selon Summerfield, en gros la moitié de la population de Gaza en gros « a séjourné un certain temps dans les prisons [israéliennes], certains d’entre eux pendant des années. » La proportion d’hommes adultes de Gaza interrogée er torturée, ajoute-t-il, est probablement plus élevée que dans n’importe quelle population dans le monde.
Plus il en a vu et plus la détermination de Summerfield s’est renforcée. Il commença à publier des articles citant des rapports sur les droits de l’homme, d’Amnesty International, du Comité de la Croix Rouge et des Commissions de l’ONU, « qui tous pointaient la persistance de la torture comme une politique d’Etat en Israël et l’effrayant usage indiscriminé de la puissance de feu contre des enfants qui lançaient des pierres.» 25 % des tués de la première Intifida étaient des enfants – environ 400 – ce qui «semble peu de choses» comparé à la deuxième Intifada. Depuis 2000, les soldats Israéliens ont tué 1000 enfants. La plupart d’entre eux, observe-t-il, ont été tués « à faible distance par des snipers : une seule balle dans la tête ou au cou. » Il est choquant, dit-il, de constater comment le corps médical Israélien reste « absolument silencieux » sur les conséquences de l’occupation en matière de droits de l’homme et de santé.
Ce qui l’a amené progressivement à entrer en conflit avec l’AMI, l’instance officielle qui est supposée donner des repères éthiques aux jeunes médecins et garantir qu’Israël se conforme aux normes internationales, dont le cadre est fixé par la Déclaration de Tokyo de la World Medical Association et qui résume la manière dont les médecins devraient se comporter. Summerfield explique : « Ils ne doivent pas accepter la torture ni être présents pendant la torture et devraient la dénoncer s’ils y étaient confrontés.»
Il soupire qu’ironiquement, la World Medical Association est née après la deuxième guerre mondiale justement à cause de ce que les médecins Allemands avaient fait aux prisonniers Juifs. «L’Association Médicale Israélienne est signataire de ces déclarations et pourtant il est devenu évident qu’elle est entièrement complice des crimes de guerre commis par l’Etat israélien.»
Les articles qu’il a publiés dans les plus prestigieuses et anciennes revues médicales – The Lancet et le British Medical Journal (BMJ) – les revues médicales américaines refusent de publier sur les souffrances des Palestiniens, explique-t-il – et exposant cette complicité l’ont placé en conflit ouvert avec l’Association Médicale Israélienne.
Son article le plus controversé, «Palestine, agression contre la santé et crimes de guerre» paru dans le BMJ en 2004, affirmait que l’armée israélienne avait tué «plus de civils Palestiniens non armés depuis septembre 2000 qu’il n’y a eu de morts le 11 septembre 2001. »
« Je ne donne pas mon opinion. Je cite les organisations internationales des droits de l’homme et les instances onusiennes. Les faits sont déjà connus, » explique Summerfield. Il ne fait que les mettre bout à bout et se battre ensuite pour qu’ils soient rendus publics.
De nombreux médecins craignent encore d’être qualifiés d’antisémites s’ils critiquent Israël. Pas Summerfield.
« On me traite tout le temps d’antisémite. Ca ne m’arrête pas. Et même ça m’encourage parce que ça veut dire que je les atteins. Donc c’est la bagarre mais ce qui est intéressant dans la bagarre c’est qu’elle fait plus de publicité et amène à prendre conscience. Elle éveille les gens d’une manière ou d’une autre. Et une partie de l’affaire est celle-ci : quand un médecin est-il médecin ? C’est-à-dire que c’est une profession humanitaire qui a, on le suppose, une autorité morale dans une société secourir les gens sans tenir compte de la politique. Et quand un médecin est-il un citoyen ? C’est un tout autre problème et ce que j’ai découvert au bout du compte c’est que les médecins Israéliens sont clairs là-dessus, leur loyauté va à l’appartenance à Israël et si Israël dit qu’on doit torturer des Palestiniens et tirer sur des enfants dans la rue, alors ces médecins feront de leur mieux pour cacher cette vérité ou la faire apparaître comme légitime, lui donner une apparence correcte. Ils donnent un visage sympathique à l’occupation.»
« Les preuves de l’implication des médecins Israéliens,» insiste-t-il, « sont écrasantes dans la torture au quotidien des Palestiniens,» ce qui l’a amené à conclure que l’AMI est en fait « une branche de la sécurité de l’Etat.»
Mais Israël n’est-il pas une exception du fait que c’est le seul Etat au monde où l’ensemble de la population adulte est réserviste de l’armée ? C’est une société complètement militarisée.
«Exactement,» assène Summerfield, « ce qui rend la question ‘êtes-vous un citoyen ou un médecin ?’ encore plus poignante.»
Et cela ne fait-il pas d’Israël un apartheid par défaut ?
En 1999, l’AMI avait reçu une délégation de l’organisation humanitaire dans laquelle Summerfield travaillait en ce qui concerne la torture. «Le responsable de l’AMI en charge de l’éthique médicale savait que les médecins avaient le devoir de dénoncer la torture mais il leur avait dit : «Allons, qu’est-ce que deux doigts cassés quand vous interrogez un Palestinien par rapport aux informations que nous pouvons obtenir ?»
La réaction immédiate de Summerfield fut la publication de cette remarque et d’autres affaires de torture systématique de Palestiniens. Son article de 2004 dans le BMJ irrita l’establishment juif britannique qui non seulement essaya de l’intimider mais s’en prit aussi aux éditeurs de la revue qui reçurent des milliers de courriels hostiles et de menace. Summerfield répliqua en luttant encore plus, jusqu’à en venir à la campagne de boycott académique.
Summerfield se trouvait à Ramallah lorsque le syndicat britannique des professeurs d’université vota une motion de boycott des universités israéliennes en 2006.
«C’était très important ne serait-ce que comme symbole, » dit-il. «Ce sont des universitaires qui ont une certaine dimension publique.»
Mais la motion n’a pas survécu longtemps car, «scandalisé,» l’establishment juif pro Israël du Royaume-Uni a fait pression dur le président du syndicat. Une seconde motion a annulé la décision de boycott.
Un an plus tard, le 30 mai 2007, les professeurs d’université Britanniques votaient pour contraindre leur syndicat à débattre pendant un an du boycott du travail avec les universités israéliennes. Les délégués votèrent à 158 voix contre 99 pour recommander le boycott en protestation contre les «40 années d’occupation» par Israël des terres palestiniennes et pour condamner la «complicité» des universitaires Israéliens.
Summerfield explique : « Bien entendu, il est difficile à appliquer et il y a d’énormes pressions mais nous sommes optimistes.» Son organisation – le British Committee for the Universities of Palestine, un organisme basé au Royaume Uni et dont la mission consiste à soutenir les universités palestiniennes et à s’opposer à l’occupation illégale de terres palestiniennes pas Israël – n’épargne aucun effort dans ses tentatives d’influer sur l’opinion publique britannique et les politiques pour qu’ils constatent et réagissent aux violations par Tel Aviv des conventions sur les droits de l’homme et son refus d’accepter les résolutions de l’ONU ou les décisions de la Cour Internationale de Justice et, tout aussi important, reconnaître la répression persistante par Israël de la liberté académique des Palestiniens.
«Le boycott,» soutient-il, «met en lumière ce qui se passe. Et ce qui se passe, c’est la collusion de l’establishment universitaire en Israël. Pas une seule université israélienne n’a protesté quand les universités palestiniennes ont été fermées. L’université de Bir Zeit a été fermée pendant trois ans. On tire sur des étudiants à des check points, ils ne peuvent pas aller en cours, les médecins ne peuvent pas aller voir les patients. Rien. Certaines universités israéliennes sont maintenant construites sur des terres palestiniennes, des terres volées. Les institutions académiques, notamment médicale, sont en collusion totale avec le colonialisme expansionniste de l’Etat.»
Même si son organisation a besoin de plus de soutien, Summerfield explique qu’ils ont réussi à créer un réseau de professionnels et d’autres personnes dans le monde entier. L’an dernier, ils ont publié une lettre dans The Guardian, signée par 130 médecins Britanniques appelant au boycott de l’AMI, et leur campagne ne se situe pas qu’au niveau politique. «Nous essayons d’acheminer de l’aide à gaza, nous enseignons dans les universités palestiniennes et nous donnons aux étudiants palestiniens des places dans les universités britanniques.»
Il est frappant, explique Summerfield, de voir comment des médecins Israéliens réagissent devant lui. « Un médecin Israélien m’applaudira et m’offrira à boire si j’écris au sujet de Soudan, du Guatemala ou de la Chine. Si je laissais tomber Israël pour le Soudan, ce serait formidable. Mais comme je dis que ça se passe en Israël, ils me disent que je fais de la propagande pour le terrorisme ou ils me traitent de Nazi. En psychologie, on dit qu’il y a plusieurs pièces dans notre cerveau et qu’il faut demander depuis laquelle on parle et dans laquelle on se trouve. En fonction des pièces nous nous comportons différemment. Le fait est que j’ai toujours été sévère envers Israël et qu’il doit y avoir des motifs bizarres pour qu’ils fassent de moi un antisémite.»
« Il est indubitable que le soutien à Israël est ancré dans les systèmes occidentaux. Les Etats-Unis et le Royaume Uni considèrent Israël comme un pays européen. Israël continue à miser sur l’holocauste et l’antisémitisme comme moyen de bloquer la vérité [sur sa politique] »
«C’est un combat bien plus ardu que celui contre l’apartheid. C’est pourquoi aucun d’entre nous ne se leurre. Mais je pense que nous avons obtenu quelques succès modestes et je pense que ça continue. Israël, c’est certain, les a pris extrêmement au sérieux. Chaque fois qu’un ministre Israélien vient à Londres, la première chose qu’il veut est de parler du boycott. Ce qu’ils craignent c’est la puissance du discours auquel ces choses font écho. C’est de ça qu’ils ont peur.»
«Quelle mesure pourrait être efficace ?
«En définitive, ce qui serait efficace serait de ne pas acheter de marchandises israéliennes et d’essayer d’amener des entreprises à retirer leurs investissements de celles qui sont liées à Israël.»
En 2004, l’église presbytérienne américaine, avec quelques autres églises, a discuté du retrait sélectif d’investissements dans des sociétés qui opèrent en Israël, en retirant leur argent de compagnies comme Caterpillar dont les bulldozers participent à la démolition de maisons palestiniennes. « Il y a une marée montante,» estime Summerfield qui concède cependant que «c’est vrai que c’est terriblement lent et que la plupart de ces gens ne font pas de politique.»
« Il est évident que nous devons influer sur les politiciens… mais sur 550 députés en Grande Bretagne, plus de 200 font partie du groupe d’amitié avec Israël et leur souci est c’arrêter ce genre de choses, de les cacher. C’est incroyable comment ce lobby est puissant.»
Cependant les universitaires et les médecins Israéliens « commencent à se sentir moins à l’aise» qu’auparavant devant l’évolution de l’opinion publique.
Summerfield interpelle souvent les médecins Juifs en leur posant une question d’ordre moral : «Réalisez-vous le bien que vous pouvez faire au monde dès lors que trois ou quatre médecins Juifs qui ont des liens avec l’AMI affirment que l’implication des médecins Israéliens dans les salles d’interrogatoire doit cesser. La torture devra cesser parce qu’alors la Shabak (Services Généraux de Sécurité) ne pourra plus procéder comme elle a l’habitude de le faire. Je leur dis que ne pas le faire est de la corruption morale.»
Tout cela, avec un travail à plein temps (il est l’un des psychiatres britanniques les plus éminents, ses recherches et sa famille (il a une fille de 12 ans), où Summerfield trouve-t-il le temps ?
« Ici en Egypte par exemple, la torture est endémique. Je me sers d’Israël et de la Palestine comme exemple type, mais la question plus large serait de savoir si nous devrions nous attendre à avoir des standards plus élevés chez les médecins, les comptables ou les banquiers et les journalistes dans le monde arabe et ailleurs. Telle est la question.»
Quand un médecin est-il un médecin ? Et quand est-il un citoyen ?
Cela fait plus de dix ans que le psychiatre Britannique Derek Summerfield a appelé au boycott universitaire d’Israël dans le domaine médical. Ayant grandi en Afrique du sud, fils d’une Zimbabwéenne Afrikaner et d’un père Britannique, il sait trop bien ce que signifie la discrimination raciale. Il l’a vécue.
Avant même de visiter les territoires palestiniens vers la fin de la première Intifada (1987 – 1992), où il vit de ses yeux la torture systématique et institutionnalisée des Palestiniens par Israël, Summerfield «avait toujours été fâché contre Israël.»"
«Lors de ma première journée à Jérusalem, voir le comportement de jeunes soldats israéliens à un check point envers un vieil homme Palestinien m’a semblé quelque chose de très familier, » dit-il. Je voyais ce genre de choses en Afrique du sud où j’ai grandi. »
Summerfield a consacré ces seize dernières années à faire connaître les crimes de guerre israéliens et à publier dans les plus grandes revues médicales britanniques de sévères critiques de la complicité des médecins Israéliens. Aujourd’hui, le nom de ce professeur honoraire au London Institute of Psychiatry et professeur associé au Refugee Studies Centre de l’Université d’Oxford, revient souvent dans le très discuté boycott britannique des échanges avec les universités israéliennes. Comme il est médecin, son approche et son militantisme se sont focalisés sur l’aspect médical de la campagne de boycott pendant laquelle il a mis en question de manière convaincante la responsabilité morale et éthique du corps médical. Il est l’ennemi public N°1 pour les groupes de pression juifs au Royaume Uni, et pour l’Association Médicale israélienne (AMI), parce qu’il pose les bonnes questions.
« J’ai toujours été un médecin intéressé par les droits de l’homme et par des problèmes plus larges et on devrait dire que les médecins ont autant la responsabilité de s’exprimer sur les causes politiques et sociales de la détresse et de la maladie que de soigner des individus, » a-t-il déclaré à Al-Ahram Weekly au cours d’une récente visite de deux jours au Caire. Summerfield a été invité à prononcer la conférence annuelle Okasha, un événement organisé par les plus éminents psychiatres Egyptiens, Ahmed Okasha, Farouk Lotaief et Mohamed Ghanem. Il a choisi de parler des droits de l’homme et de la responsabilité du corps médical.
L’intérêt de Summerfield pour la question palestinienne remonte à loin. Alors qu’il travaillait à la Medical Foundation for Victims of Torture à Londres au début des années 90, il rencontra de nombreux patients palestiniens qui avaient été torturés par des soldats Israéliens. Et au cours de sa première visite dans les territoires palestiniens occupés, il devint clair pour lui qu’Israël avait depuis longtemps adopté la torture comme « politique d’Etat. » Déjà à l’époque, Gaza était « mal en point mais bien moins qu’en ce moment.»
Summerfield s’est alors impliqué dans le Community Mental Health Programme de Gaza.
«J’étais à Gaza le jour où le soi-disant processus de paix a été signé à Oslo en août 1993 et c’était très intéressant parce que la plupart des gens que je connaissais étaient incroyablement heureux. Ils pensaient que c’était la fin de tout ça. Mais une minorité de Palestiniens disaient – et ils se sont avérés avoir raison – que ce n’était pas un bon accord, qu’ils étaient pessimistes et que Yasser Arafat ne savait pas ce qu’il avait signé.»
Ce qu’il a vu – « le crime le plus ignoble a été minimisé ici par un pouvoir colonial qui se considère comme faisant partie de l’Europe. Ils s’emparaient de terres palestiniennes et les torturaient de manières qui rappelaient l’Afrique du sud mais, comme il s’est avéré, bien pires qu’en Afrique du sud » -- l’a obligé à s’impliquer activement dans le problème palestinien.
Ayant été témoin des deux Intifadas, Summerfield déclare que dans la deuxième, la conduite des forces israéliennes d’occupation a été « bien plus ouvertement brutale et que les grandes puissances n’ont rien dit du tout.»
« Il fut un temps » dit-il, « où avant de lancer un raid les chefs militaires Israéliens discutaient de comment il serait perçu en Europe et aux Etats-Unis. Ils ne s’embêtent plus avec ça maintenant. Et clairement, la torture était un problème important pour ces pays. »
Selon Summerfield, en gros la moitié de la population de Gaza en gros « a séjourné un certain temps dans les prisons [israéliennes], certains d’entre eux pendant des années. » La proportion d’hommes adultes de Gaza interrogée er torturée, ajoute-t-il, est probablement plus élevée que dans n’importe quelle population dans le monde.
Plus il en a vu et plus la détermination de Summerfield s’est renforcée. Il commença à publier des articles citant des rapports sur les droits de l’homme, d’Amnesty International, du Comité de la Croix Rouge et des Commissions de l’ONU, « qui tous pointaient la persistance de la torture comme une politique d’Etat en Israël et l’effrayant usage indiscriminé de la puissance de feu contre des enfants qui lançaient des pierres.» 25 % des tués de la première Intifida étaient des enfants – environ 400 – ce qui «semble peu de choses» comparé à la deuxième Intifada. Depuis 2000, les soldats Israéliens ont tué 1000 enfants. La plupart d’entre eux, observe-t-il, ont été tués « à faible distance par des snipers : une seule balle dans la tête ou au cou. » Il est choquant, dit-il, de constater comment le corps médical Israélien reste « absolument silencieux » sur les conséquences de l’occupation en matière de droits de l’homme et de santé.
Ce qui l’a amené progressivement à entrer en conflit avec l’AMI, l’instance officielle qui est supposée donner des repères éthiques aux jeunes médecins et garantir qu’Israël se conforme aux normes internationales, dont le cadre est fixé par la Déclaration de Tokyo de la World Medical Association et qui résume la manière dont les médecins devraient se comporter. Summerfield explique : « Ils ne doivent pas accepter la torture ni être présents pendant la torture et devraient la dénoncer s’ils y étaient confrontés.»
Il soupire qu’ironiquement, la World Medical Association est née après la deuxième guerre mondiale justement à cause de ce que les médecins Allemands avaient fait aux prisonniers Juifs. «L’Association Médicale Israélienne est signataire de ces déclarations et pourtant il est devenu évident qu’elle est entièrement complice des crimes de guerre commis par l’Etat israélien.»
Les articles qu’il a publiés dans les plus prestigieuses et anciennes revues médicales – The Lancet et le British Medical Journal (BMJ) – les revues médicales américaines refusent de publier sur les souffrances des Palestiniens, explique-t-il – et exposant cette complicité l’ont placé en conflit ouvert avec l’Association Médicale Israélienne.
Son article le plus controversé, «Palestine, agression contre la santé et crimes de guerre» paru dans le BMJ en 2004, affirmait que l’armée israélienne avait tué «plus de civils Palestiniens non armés depuis septembre 2000 qu’il n’y a eu de morts le 11 septembre 2001. »
« Je ne donne pas mon opinion. Je cite les organisations internationales des droits de l’homme et les instances onusiennes. Les faits sont déjà connus, » explique Summerfield. Il ne fait que les mettre bout à bout et se battre ensuite pour qu’ils soient rendus publics.
De nombreux médecins craignent encore d’être qualifiés d’antisémites s’ils critiquent Israël. Pas Summerfield.
« On me traite tout le temps d’antisémite. Ca ne m’arrête pas. Et même ça m’encourage parce que ça veut dire que je les atteins. Donc c’est la bagarre mais ce qui est intéressant dans la bagarre c’est qu’elle fait plus de publicité et amène à prendre conscience. Elle éveille les gens d’une manière ou d’une autre. Et une partie de l’affaire est celle-ci : quand un médecin est-il médecin ? C’est-à-dire que c’est une profession humanitaire qui a, on le suppose, une autorité morale dans une société secourir les gens sans tenir compte de la politique. Et quand un médecin est-il un citoyen ? C’est un tout autre problème et ce que j’ai découvert au bout du compte c’est que les médecins Israéliens sont clairs là-dessus, leur loyauté va à l’appartenance à Israël et si Israël dit qu’on doit torturer des Palestiniens et tirer sur des enfants dans la rue, alors ces médecins feront de leur mieux pour cacher cette vérité ou la faire apparaître comme légitime, lui donner une apparence correcte. Ils donnent un visage sympathique à l’occupation.»
« Les preuves de l’implication des médecins Israéliens,» insiste-t-il, « sont écrasantes dans la torture au quotidien des Palestiniens,» ce qui l’a amené à conclure que l’AMI est en fait « une branche de la sécurité de l’Etat.»
Mais Israël n’est-il pas une exception du fait que c’est le seul Etat au monde où l’ensemble de la population adulte est réserviste de l’armée ? C’est une société complètement militarisée.
«Exactement,» assène Summerfield, « ce qui rend la question ‘êtes-vous un citoyen ou un médecin ?’ encore plus poignante.»
Et cela ne fait-il pas d’Israël un apartheid par défaut ?
En 1999, l’AMI avait reçu une délégation de l’organisation humanitaire dans laquelle Summerfield travaillait en ce qui concerne la torture. «Le responsable de l’AMI en charge de l’éthique médicale savait que les médecins avaient le devoir de dénoncer la torture mais il leur avait dit : «Allons, qu’est-ce que deux doigts cassés quand vous interrogez un Palestinien par rapport aux informations que nous pouvons obtenir ?»
La réaction immédiate de Summerfield fut la publication de cette remarque et d’autres affaires de torture systématique de Palestiniens. Son article de 2004 dans le BMJ irrita l’establishment juif britannique qui non seulement essaya de l’intimider mais s’en prit aussi aux éditeurs de la revue qui reçurent des milliers de courriels hostiles et de menace. Summerfield répliqua en luttant encore plus, jusqu’à en venir à la campagne de boycott académique.
Summerfield se trouvait à Ramallah lorsque le syndicat britannique des professeurs d’université vota une motion de boycott des universités israéliennes en 2006.
«C’était très important ne serait-ce que comme symbole, » dit-il. «Ce sont des universitaires qui ont une certaine dimension publique.»
Mais la motion n’a pas survécu longtemps car, «scandalisé,» l’establishment juif pro Israël du Royaume-Uni a fait pression dur le président du syndicat. Une seconde motion a annulé la décision de boycott.
Un an plus tard, le 30 mai 2007, les professeurs d’université Britanniques votaient pour contraindre leur syndicat à débattre pendant un an du boycott du travail avec les universités israéliennes. Les délégués votèrent à 158 voix contre 99 pour recommander le boycott en protestation contre les «40 années d’occupation» par Israël des terres palestiniennes et pour condamner la «complicité» des universitaires Israéliens.
Summerfield explique : « Bien entendu, il est difficile à appliquer et il y a d’énormes pressions mais nous sommes optimistes.» Son organisation – le British Committee for the Universities of Palestine, un organisme basé au Royaume Uni et dont la mission consiste à soutenir les universités palestiniennes et à s’opposer à l’occupation illégale de terres palestiniennes pas Israël – n’épargne aucun effort dans ses tentatives d’influer sur l’opinion publique britannique et les politiques pour qu’ils constatent et réagissent aux violations par Tel Aviv des conventions sur les droits de l’homme et son refus d’accepter les résolutions de l’ONU ou les décisions de la Cour Internationale de Justice et, tout aussi important, reconnaître la répression persistante par Israël de la liberté académique des Palestiniens.
«Le boycott,» soutient-il, «met en lumière ce qui se passe. Et ce qui se passe, c’est la collusion de l’establishment universitaire en Israël. Pas une seule université israélienne n’a protesté quand les universités palestiniennes ont été fermées. L’université de Bir Zeit a été fermée pendant trois ans. On tire sur des étudiants à des check points, ils ne peuvent pas aller en cours, les médecins ne peuvent pas aller voir les patients. Rien. Certaines universités israéliennes sont maintenant construites sur des terres palestiniennes, des terres volées. Les institutions académiques, notamment médicale, sont en collusion totale avec le colonialisme expansionniste de l’Etat.»
Même si son organisation a besoin de plus de soutien, Summerfield explique qu’ils ont réussi à créer un réseau de professionnels et d’autres personnes dans le monde entier. L’an dernier, ils ont publié une lettre dans The Guardian, signée par 130 médecins Britanniques appelant au boycott de l’AMI, et leur campagne ne se situe pas qu’au niveau politique. «Nous essayons d’acheminer de l’aide à gaza, nous enseignons dans les universités palestiniennes et nous donnons aux étudiants palestiniens des places dans les universités britanniques.»
Il est frappant, explique Summerfield, de voir comment des médecins Israéliens réagissent devant lui. « Un médecin Israélien m’applaudira et m’offrira à boire si j’écris au sujet de Soudan, du Guatemala ou de la Chine. Si je laissais tomber Israël pour le Soudan, ce serait formidable. Mais comme je dis que ça se passe en Israël, ils me disent que je fais de la propagande pour le terrorisme ou ils me traitent de Nazi. En psychologie, on dit qu’il y a plusieurs pièces dans notre cerveau et qu’il faut demander depuis laquelle on parle et dans laquelle on se trouve. En fonction des pièces nous nous comportons différemment. Le fait est que j’ai toujours été sévère envers Israël et qu’il doit y avoir des motifs bizarres pour qu’ils fassent de moi un antisémite.»
« Il est indubitable que le soutien à Israël est ancré dans les systèmes occidentaux. Les Etats-Unis et le Royaume Uni considèrent Israël comme un pays européen. Israël continue à miser sur l’holocauste et l’antisémitisme comme moyen de bloquer la vérité [sur sa politique] »
«C’est un combat bien plus ardu que celui contre l’apartheid. C’est pourquoi aucun d’entre nous ne se leurre. Mais je pense que nous avons obtenu quelques succès modestes et je pense que ça continue. Israël, c’est certain, les a pris extrêmement au sérieux. Chaque fois qu’un ministre Israélien vient à Londres, la première chose qu’il veut est de parler du boycott. Ce qu’ils craignent c’est la puissance du discours auquel ces choses font écho. C’est de ça qu’ils ont peur.»
«Quelle mesure pourrait être efficace ?
«En définitive, ce qui serait efficace serait de ne pas acheter de marchandises israéliennes et d’essayer d’amener des entreprises à retirer leurs investissements de celles qui sont liées à Israël.»
En 2004, l’église presbytérienne américaine, avec quelques autres églises, a discuté du retrait sélectif d’investissements dans des sociétés qui opèrent en Israël, en retirant leur argent de compagnies comme Caterpillar dont les bulldozers participent à la démolition de maisons palestiniennes. « Il y a une marée montante,» estime Summerfield qui concède cependant que «c’est vrai que c’est terriblement lent et que la plupart de ces gens ne font pas de politique.»
« Il est évident que nous devons influer sur les politiciens… mais sur 550 députés en Grande Bretagne, plus de 200 font partie du groupe d’amitié avec Israël et leur souci est c’arrêter ce genre de choses, de les cacher. C’est incroyable comment ce lobby est puissant.»
Cependant les universitaires et les médecins Israéliens « commencent à se sentir moins à l’aise» qu’auparavant devant l’évolution de l’opinion publique.
Summerfield interpelle souvent les médecins Juifs en leur posant une question d’ordre moral : «Réalisez-vous le bien que vous pouvez faire au monde dès lors que trois ou quatre médecins Juifs qui ont des liens avec l’AMI affirment que l’implication des médecins Israéliens dans les salles d’interrogatoire doit cesser. La torture devra cesser parce qu’alors la Shabak (Services Généraux de Sécurité) ne pourra plus procéder comme elle a l’habitude de le faire. Je leur dis que ne pas le faire est de la corruption morale.»
Tout cela, avec un travail à plein temps (il est l’un des psychiatres britanniques les plus éminents, ses recherches et sa famille (il a une fille de 12 ans), où Summerfield trouve-t-il le temps ?
« Ici en Egypte par exemple, la torture est endémique. Je me sers d’Israël et de la Palestine comme exemple type, mais la question plus large serait de savoir si nous devrions nous attendre à avoir des standards plus élevés chez les médecins, les comptables ou les banquiers et les journalistes dans le monde arabe et ailleurs. Telle est la question.»
Interview réalisée par Amira Howeidy
Ces sionistes ne sont pas des humains,c'est pour ça il faut boycotter tout ce qui vient de là-bas et faire de meme ici avec les magasins quisont tenues par les sionistes Français
RépondreSupprimerIl est triste de constater que les médecins approuvent la torture contre les gens qu'ils ont chassé de leur terre natale ,mais point ne faut s'en étonner quand on est familier des écrits de Gilad ATZMON.Mais je n'ai pas de mots pour qualitier l'attitude des occidentaux ,juifs ou non juifs , médecins ou pas , qui approuvent ouvertement ces pratiques ,tout comme CES GENS se taisent devant l'assassinat de 2000 enfants palestiniens depuis la deuxième "intifada" .C'est révoltant et monstrueux et en mème temps je ne trouve pas d'explication à ces attitudes déshonnorantes de toute évidence !!
RépondreSupprimer« Ici en Egypte par exemple, la torture est endémique. Je me sers d’Israël et de la Palestine comme exemple type"
RépondreSupprimerIl est triste de constater que les Egyptiens sont devenus sionistes.