Contrairement à ce que peuvent laisser entendre certains bruits, le terrorisme dit islamique n'est pas forcément celui à qui on peut imputer la majorité des actes terroristes perpétrés dans le monde. Surtout qu'à mon avis, il n'y a guère de chances de voir la tentative d'assassinat politique d'une élue aux Etats Unis classée dans la rubrique actes de terrorisme.
Il a par contre droit à un traitement de faveur, au point même qu'on lui attribue des faits qui ont un probablement un rapport fort éloigné avec lui. Je pense par exemple à un certain nombre d'événements qui se produisent en Afrique sahélienne
Et ce genre d'actions qui visent particulièrement des Français, comme les deux récentes malheureuses victimes d'un enlèvement puis d'un assassinat au Niger, ne sont pas forcément pour déplaire à ceux qui ont intérêt à mettre des bâtons dans les roues à la France dans une région qui a été longtemps son pré carré. Et qui regorge de ressources naturelles en exploitation ou encore à valoriser : uranium, or, pétrole… Il y a sûrement quelque chose à creuser pour nos experts en géostratégie et en relations internationales !
Le terrorisme dit islamique a droit aussi à un traitement politico-médiatique privilégié : une cartouche d'encre de photocopieuse supposée piégée déclenche une alerte universelle alors qu'ici ou là, des bombes et des colis piégés explosent suscitant tantôt l'indifférence, tantôt une alarme circonstanciée et, pour tout dire, temporaire.
L'affaire Luis Posada Carriles est assez symptomatique de ces approches différenciées. Ce qui n'a échappé ni à Mother Jones, ni à The Nation aux Etats Unis
Un terroriste des plus notoires va être jugé la semaine prochaine au Texas. Savez-vous pourquoi ?
Par David Corn, Mother Jones (USA) 7 janvier 2010 traduit de l'anglais par Djazaïri
Ce lundi, un terroriste présumé des plus notoires va être jugé au Texas. Pas pour un quelconque lien avec le 11 septembre ou al Qaïda. Mais cet homme est accusé d'avoir ourdi des actions terroristes qui ont tué de nombreux civils innocents. Pourtant cet événement a du mal à créer un blitz médiatique. Peter Kornbluh de The Nation présente le cadre de ce procès. Voici ses paragraphes d'ouverture :
Le 10 janvier, un des plus dangereux terroristes de l'histoire récente sera jugé dans une petite sale d'audience à El Paso au Texas. Ce n'est pas l'endroit que l'administration Obama a fini par choisir pour juger les auteurs du 11 septembre ; c'est l'endroit où le fameux parrain de la violence cubaine en exil, Luis Posada Carriles, pourrait finalement assumer un minimum de responsabilité pour ses nombreux crimes.Dans les annales de la justice moderne, le procès Posada se distingue comme une des procédures les plus bizarres et les moins respectueuses de la règle. Cet homme identifié dans les rapports des services de renseignements US comme un organisateur de la destruction en plein vol d'un avion de ligne cubain – les 73 personnes à son bord avaient toutes été tuées quand l'avion s'était abimé en mer au large des Barbades le 6 octobre 1976 – et qui se flattait publiquement d'être derrière toute une série d'attentats à la bombe contre des hôtels à la Havane qui avaient tué un homme d'affaires Italien, Fabio Di Celmo, est poursuivi pour parjure et fraude, pas pour attentat et destruction. La gestion de ce dossier pendant les années Bush en avait fait une source d'embarras à l'international et avait donné une piètre image de la volonté et de la capacité du Département de la Justice à poursuivre des crimes terroristes quand le terroriste en question a té un agent et un allié des Etats Unis. Pour l'administration Obama, le verdict aura des implications significatives quant à la crédibilité de l'administration des Etats Unis dans la lutte contre le terrorisme ainsi que pour l'avenir des relations entre les USA et Cuba.
Avec tous les discours de fermeté de ces dernières années (et décennies) sur la sévérité des Etats Unis avec le terrorisme – avant et après le 11 septembre – la gestion laxiste du dossier Posada par diverses administrations offre un modèle d'hypocrisie.
Posada n'est effectivement pas jugé pour des actes terroristes mais pour parjure comme on l'a vu. The Nation récapitule précisément l'histoire de Posada.
Le procès Posada va intervenir près de six ans après qu'il ait annoncé effrontément à Miami qu'il allait demander l'asile politique aux Etats Unis. Nous avions là quelqu'un qui avait fui la justice du Venezuela – Posada s'était évadé de prison là bas en 1985 alors qu'il était jugé pour l'attentat contre l'avion – qui avait été incarcéré à Panama de novembre 2000 à août 2004 pour tentative d'assassinat sur Fidel Castro avec plus de 100 kilos de dynamite et d'explosif C-4. En dépit d'une demande d'arrestation par Interpol, l'administration Bush lui avait permis pendant deux mois de se montrer en public à Miami où il reste considéré comme quelqu'un d'héroïque par les ultras anti castristes de la communauté en exil. Sûr d'être bien accueilli, Posada avait même déposé une demande pour être naturalisé citoyen des Etats Unis. C'est seulement après que la presse s'est intéressée à l'hypocrisie de la Maison Blanche qui affirmait être à la tête d'une guerre internationale contre le terrorisme tout en permettant à un terroriste recherché de circuler librement en Floride que des agents du Department of Homeland Security avaient finalement interpellé Posada le 17 mai 2005.Posada a été initialement incarcéré à El Paso pour entrée illégal aux Etats Unis. Les services de police de l'air et des frontières. [Immigration and Customs Enforcement (ICE)] ont fait des démarches pour essayer de l'expulser, mais aucun pays n'en voulait. Dans le même temps, les Etats Unis avaient refusé de l'extrader vers un pays qui pouvait le réclamer à bon droit – le Venezuela. C'est seulement après que le tribunal de l'immigration a décidé de le libérer sous caution que la police de l'air et des frontières l'a officiellement identifié comme étant un terroriste. « Le longue histoire [de Posada] d'activité criminelle et de violence par lesquelles des civils innocents ont été tués, » écrivait l'ICE, signifiait que « sa sortie de détention représentait un danger pour la société et la sécurité nationale des Etats Unis ».
L'article de The Nation note que des démarches ont bien été faites pour réunir un grand jury et inculper Posada pour crimes terroristes. Des démarches qui ont capoté rapidement pour des raisons qui « restent sous scellés. »
Et c'est libre que Posada comparaîtra devant le tribunal !
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire
Commentaires publiés après modération. Les propos injurieux, diffamatoires ou à caractère raciste ne seront pas publiés.