mardi 11 décembre 2012

La crise syrienne pensée hors de la boîte (à idées reçues) par Camille Otrakji


Je vous propose un article qui date un peu mais qui reste d’actualité et dénonce les basses manœuvres saoudo-occidentales contre la Syrie.
L’auteur, Camille Otrakji, nous rappelle que depuis quelques temps la voix de la Syrie supposée résonner à paris ou à Londres n’est pas celle des syriens mais tout au plus d’une clique dûment stipendiée par le Qatar et l’Arabie Saoudite d’un côté, les Etats Unis et l’OTAN de l’autre.
Camille Otrakji, nous propose la métaphore de la boîte (boîte à malices ou boîte à outils ?) dont le contenant, soit 6 justifications pour l’ingérence, est censé autoriser l’Occident à se mêler des affaires syriennes et à exiger le départ du régime en place.

Par Camille Otrakji, The Syria Page 9 octobre 2012 traduit de l’anglais par Djazaïri

L’engagement de la communauté internationale pour l’emporter dans le conflit en Syrie s’accroît et atteint des niveaux sans précédent.

La semaine dernière, l'administration Obama a promis un financement plus direct pour les rebelles qui se battent contre l'armée syrienne. Cette semaine, le ministre des affaires étrangères australien Bob Carr a suggéré que l'assassinat du Président de la Syrie pourrait être une option raisonnable et nécessaire. Le Premier ministre turc Erdogan dont le pays est membre de l'OTAN État a dit que son pays était prêt à faire la guerre avec la Syrie.

Si vous écoutez l’intégralité de l’interview de Bob Carr sur le réseau d’ABC Australie, vous pourrez entendre une question qui commence par: la plupart des reportages suggèrent assez régulièrement que la chute du régime n’est qu’une question de temps”. Les attentes d’une fin imminente du régime, dont on considère qu’elle est la définition même du «succès» ont été au cours de ces 20 derniers mois un des principaux piliers de la motivation des membres de l’alliance conduite par la communauté internationale dans sa tentative de faire tomber le régime de Damas.

Personne n'a questionné le Premier ministre Erdogan au sujet de ses déclarations d’il y a un an selon lesquelles «les jours d'Assad sont comptés»

Personne n'a interrogé l'administration Obama sur ses fréquentes  affirmations il y a un an que «le temps d’Assad était compté"

Personne n'a demandé à  Ehud Barak, le ministre israélien de la Défense, qui a déclaré à nouveau en Juillet 2012 que «la chute d'Assad est plus proche que jamais" ce que cela signifiait vraiment. "plus que jamais" est moins précise que ses déclarations optimistes d’il y a 10 mois selon lesquelles «Assad sera renversé en quelques semaines"

Les six facettes de la boîte à outils de la crise syrienne

La communauté internationale veut gagner à tout prix, en Syrie, mais de nos jours il n'est pas politiquement correct de présenter ses objectifs en des termes aussi abrupts. Une approche plus politiquement correcte consiste à établir un récit portant sur les droits de l'homme. Quiconque propose des solutions ne doit pas sortir hors de  la boîte fabriquée par la communauté internationale pour la crise en Syrie:

the-syria-crisis-box
Vignette du haut: penser hors de la boite, dialogue et évolution, pas armes et révolution
- Les jours du régime sont comptés. Les opposants au régime peuvent réussir s’ils travaillent avec nous encore quelques semaines de plus, c'est tout ce qu'il faudra.
- Les Syriens nous remercieront de les avoir aidés à renverser le régime. Ce sera bon pour la Syrie. Si seulement nous renversons le régime. Une courte période de transition peut être difficile, mais peu de temps après ce sera la démocratie et d’autres évolutions positives seront à portée de main.
- "Le peuple syrien" veut que nous renversions le régime, pas parvenir à un compromis avec lui. Vous ne pouvez pas vous tromper si vous êtes du côté du «peuple syrien». Les gens ont une seule chose en tête ... le changement, un changement complet et total.
- Le prix à payer pour un changement révolutionnaire n'est pas trop élevé. Le peuple syrien est prêt à payer ce prix plutôt que le coût beaucoup plus faible de la recherche d’un changement par une évolution qui ne suit pas la formule du "printemps arabe" que nous trouvons des plus excitantes ici aux États-Unis. La Syrie ne sera pas détruite dans ce processus, son économie sera facile à redresser. Les gens travailleront ensemble après cette guerre civile.
- Le régime, c’est la famille Assad. Débarrassez-vous de Assad et vous pourrez crier victoire. Faites que Farouk Chareh remplace Assad ... suivez la solution de formule du Yémen  vers la démocratie [ voir commentaire ici ]
- Travailler avec les islamistes est inévitable et raisonnable. L'Occident peut utiliser la force des islamistes pour combattre et renverser le régime, ALORS l'Occident pourra installer ses alliés syriens de l'opposition laïque et éliminer les islamistes de la scène. Si les islamistes gagnent les prochaines élections en Syrie, ce ne sera pas un problème. Ils seront sous le contrôle et l’influence des islamistes modérés de Turquie.
Toutes ces hypothèses ont été faites sans consulter le "peuple syrien". Après les premières manifestations symboliques à Deraa et Damas, les gouvernements et les médias occidentaux ont commencé à faire toutes les hypothèses ci-dessus. Personne ne veut de nous expliquer d’où viennent les 250.000 soldats et officiers dévoués qui constituent l'armée régulière syrienne s'ils ne font pas partie du «peuple syrien».

Pour trouver un moyen de sortir de la crise très dangereuse en Syrie, il faudra réfléchir en dehors de cette boîte bien pratique. En dehors de cette boîte, vous pourriez être en mesure de réaliser que la victoire est beaucoup plus coûteuse et incertaine. Que la laïcité pourrait être une bien meilleure alternative à l'expérimentation avec les alliés Erdogan, les Frères musulmans et les salafistes alliés de l'Arabie Saoudite, et surtout que la crise en Syrie est beaucoup plus que cela. C'est la crise au Moyen-Orient. Les Etats-Unis doivent faire face à tous les conflits régionaux qu’ils ont esquivés depuis des décennies.

La crise en Syrie n'a pas pour objet le maintien d’Assad au pouvoir ou non comme on veut vous le faire croire. C'est le dernier avertissement aux USA pour qu’ils
refondent une politique en panne au Moyen-Orient avant qu'il ne soit trop tard.

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