mardi 3 juin 2014

Mohamed Merah, Mehdi Nemmouche, les loups solitaires du Procureur de la République

Mehdi Nemmouche a moins de succès médiatique que Mohamed Merah. Il faut dire qu'alors que Mohamed Merah avait été tué au terme d'une opération policière spectaculaire et retransmise en quasi direct, l'auteur présumé de la fusillade meurtrière du musée juif de Bruxelles a été interpellé en douceur au cours d'un contrôle de routine effectué par la police de l'air et des frontières au terminus de la ligne de bus Amsterdam - Bruxelles -Marseille.

Si Mohamed Merah avait eu le bon goût de se planquer dans son propre appartement (en effet quel meilleur refuge que son chez-soi quand on est activement recherché par la police?) Mehdi Nemmouche a eu de son côté la délicatesse de prendre une ligne de bus internationale au départ de la ville où il aurait commis son crime, non sans emporter avec lui les armes utilisées au musée juif: pistolet et fusil d'assaut de type Kalashnikov, mais aussi la casquette qui est probablement l'élément le plus distinctif sur les vidéos diffusées par la police belge ainsi qu'une espèce de drap frappé de l'emblème de l'Etat Islamique en Irak et au Levant, une des milices actives en Syrie et en Irak.

Malgré le manque relatif de succès médiatique de Mehdi Nemmouche, la presse et les autorités françaises, se sont empressées de faire le parallèle entre les itinéraires des deux personnages: deux jeunes d'origine maghrébine nés en France, un milieu familial désuni, un passé de petit délinquant et enfin l'embrigadement dans la mouvance terroriste dite islamiste ou djihadiste.

Dans les deux cas, nous dit-on, l'embrigadement a été l'aboutissement d'un processus d'auto-radicalisation de loups solitaires.

Pourtant, les loups solitaires semblaient connaître du monde et j'ai personnellement du mal à me figurer comment quelqu'un qui s'est auto-radicalisé peut finir par s'intégrer rapidement au sortir de sa détention dans une milice armée à des milliers de kilomètres de son dernier domicile connu.
Parce que c'est ainsi que ça s'est passé pour Mehdi Nemmouche qui aurait effectivement participé à la lutte armée  contre le gouvernement syrien.

Ce qui le différencie d'un Mohamed Merah qui, s'il s'est rendu en divers endroits comme l'Afghanistan ou Tel Aviv n'a jamais été signalé comme ayant pris part à des actions armées.

On peut nous prendre pour des sots, mais je ne vois pas comment un quidam auto-radicalisé et sans le sou peut se rendre en Syrie pour y rejoindre un groupe armé qui ne va pas vous incorporer dans ses rangs sans avoir une idée assez précise de qui vous êtes et de vos motivations.  Ce Mehdi Nemmouche, s'il a bien combattu en Syrie en tout cas, a nécessairement été pris en charge par une filière qui a au minimum des correspondants en France et l'a introduit auprès des cadres de l'Etat Islamique en Irak et au Levant (EIIL).

Les gens de l'EIIL sont peut-être des extrémistes mais ils sont organisés comme n'importe quel groupe combattant dans une zone de guerre difficile et complexe, avec ses luttes intestines et ses agents doubles. Et notez bien que la fiche "parcours" de M. Nemmouche publiée par France [dés)Info l'affilie au Jabhat al Nosra, une organisation aux relations pour le moins tendues avec l'EIIL.

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Alors qui a lancé cette thèse du loup solitaire et du jeune auto-radicalisé?

Dans l'affaire Mohamed Merah comme dans l'affaire Mehdi Nemmouche, le concept tire son origine de la même source, le Procureur de la République François Molins qui avait en charge le dossier Mohamed Merah.

Ce n'est certes pas un hasard si François Molins qui exerçait déjà à ce poste sous Nicolas Sarkozy y a été maintenu par l'équipe de François Hollande. Ce maintien est le signe de la continuité d'une politique judiciaire à l'égard des jeunes  Arabo-musulmans sur le plan intérieur et d'une politiqué étrangère à l'égard des peuples arabo-musulmans sur le plan extérieur.
François Molins désigne un loup solitaire Abdelhakim Dekhar
François Molins désigne le loup solitaire Abdelhakim Dekhar

François Molins, c'est l'instrument indispensable du gouvernement par la crédibilité associée à sa pseudo-expertise en matière judiciaire. Or, sa fonction est moins technique que politique, et c'est donc bien la politique du gouvernement qu'il met en oeuvre.

Cette thèse du loup solitaire, libre à chacun de la croire.

En tout cas, le Belge André Vandoren, patron de l'Organe de coordination pour l'analyse de la menace (OCAM) n'y croit pas.
André Vandoren
André Vandoren
M. Vandoren observe en effet:
"à mes yeux, il ne s'agissait pas de l'acte d'un loup solitaire: un terroriste qui aurait tout fait tout seul. Il a voyagé vers la Syrie et d'autres pays. L'enquête devra détailler tout son parcours. Comment a-t-il été formé? Comment a-t-il pu échapper à tout contrôle pendant plusieurs jours après l'attentat?"

C'est du simple bon sens. L'OCAM est un organisme interministériel chargé d'analyser la menace terroriste contre la Belgique en traitant des informations fournies par des services comme les douanes, la police fédérale, le service public fédéral mobilité et transport etc.




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