Le Christian Science Monitor revient sur les variations qui ont affecté le récit sur l’exécution/assassinat d’Oussama ben Laden et recense les quatre aspects sur lesquels les autorités de Washington l’ont fait évoluer.
On notera au passage que certains aspects de cette opération frisent le comique ou le surréalisme selon la façon dont on préfère classer les œuvres de fiction.
A ceux qui crient à la théorie du complot (comme si les complots ou les conspirations n’existaient pas), on peut rappeler les menteries de Colin Powell devant les instances de l’ONU et devant les caméras du monde entier, n’hésitant pas à exhiber un flacon d’urine pour justifier une action militaire de l’ONU contre l’Irak. Powell n’obtiendra pas la résolution, mais l’Irak sera néanmoins ravagé par la soldatesque américaine et ses collaborateurs. Où encore celles toutes récentes de Susan Rice, ambassadrice des Etats Unis à l’ONU, plaquant ses propres fantasmes sexuels sur le comportement des troupes libyennes face à la rébellion contre le colonel Kadhafi.
Pourtant, nous sommes encore une fois sommés de croire le gouvernement US sur parole sous peine d’être accusé d’adepte des théories du complot ou même tout simplement d’anti-américanisme.
Et l’histoire bidonnée d’un valeureux commando yankee prenant tous les risques pour sauver le soldat Ryan la patrie n’est pourtant en rien une nouveauté. On s’en souvient peut-être, le sauvetage héroïque de la soldate Jessica Lynch prisonnière de l’ennemi en Irak après avoir combattu bravement. Les étudiants de l’Institut de Journalisme de Bordeaux ont beau écrire que la manipulation médiatique du sort de Jessica Lynch avait traumatisé la presse américaine, nous savons que c’est le genre de traumatisme dont beaucoup de journalistes se remettent facilement Comme on le voit dans l'article, ils en sont réduits à taquiner les responsables de l'armée quand ces derniers leur livrent une ouvelle version toujours plus "vraie" de ce qui s'est passé à Abbottabad.
La seule vraie question est pourquoi maintenant et quelles seront les répercussions de l’annonce de la mort d’Oussama ben Laden sur les orientations de la politique étrangère de Washington où le débat semble faire rage au sommet de l’Etat.
par Anna Mulrine, The Christian Science Monitor (USA) 7 mai 2011 traduit de l'anglais par Djazaïri
La détermination de ce qui s’est exactement passé dans le compound d’Oussama ben Laden aux toutes premières heures de l’attaque du commando US a amené à quelques brusques réaménagements du récit. Lors d’un briefing au Pentagone vendredi, des journalistes ont taquiné les officiels de l’armée, leur disant qu’ils étaient impatients d’entendre la cinquième nouvelle version de la manière dont s’est déroulée l’attaque du cerveau terroriste.
Voici les quatre dernières évolutions de l’intrigue dans l’histoire ben Laden
1. Les derniers instants de ben Laden
Les informations divulguées par la Maison Blanche en cette fin de semaine visaient à mettre un terme à la question de savoir si M. ben Laden était armé, et s’il a combattu.
Ces questions s’étaient faites de plus en plus insistantes après que la maison Blanche ait donné des informations nettement contradictoires - et en premier lieu que ben Laden s’était servi d’une de ses épouses comme bouclier humain. Cette version avait été ensuite démentie par un autre officiel de la Maison Blanche.
Selon les derniers éléments communiqués par l’administration, ben Laden a été trouvé au troisième étage de son compound, devant la porte d’entrée de sa chambre. Quand il s’est retourné et à commencé à reculer, il a été atteint de deux balles, une à la tête, l’autre dans la poitrine. Le commando a par la suite découvert un fusil AK-47 et un pistolet dans la chambre de ben Laden, selon les informations.
“Il reculait,” a déclaré un official US au Washington Post ce qui, a-t-il ajouté, est considéré comme un acte de résistance légitimant l’usage des armes par le commando US. « Va-t-il prendre une arme ? » a déclaré cet officiel. « On ne sait pas pourquoi il recule, [ou] ce qu’il fait quand il retourne à l’intérieur. »
Le raid a mobilisé 79 commandos US et un chien de l’armée, qui a pus servir à la détection d’explosifs – et qui a peut-être été équipé de lunettes de protection connues sous le nom de « doggles ». Le recours aux chiens est de plus en plus fréquent dans les dangereuses régions d’Afghanistan, où ils réussissent plus souvent à déceler les bombes cachées sous les routes que les matériels de haute technologie envoyés sur le terrain par le Pentagone, affirment des officiels de l’armée US.
2. La planque de la CIA
Malgré les efforts acharnés des agents du renseignement pour confirmer la présence de ben Laden dans le compound d’Abbottabad au Pakistan, au moins un des membres du commando Navy Seal a apparemment été surprise que les USA aient finalement mis la main sur leur homme.
Un micro émettant en direct porté par un Navy Seal sur place l’aurait enregistré disant “Damn, c’est lui,” quand il a rencontré ben Laden au troisième étage de son compound », a déclaré un haut responsable militaire au Monitor.
Des articles parus dans deux grands journaux indiquent l’étendue des moyens mis en œuvre par les agents de la CIA pour essayer de confirmer la présence de ben Laden, allant jusqu’à louer une maison voisine quelques mois plus tôt. La maison avait été truffée de matériel d’observation sophistiqué et de fenêtres à glaces sans tain, mais les agents de la CIA disent avoir été néanmoins incapables ne serait-ce que de prendre une photo de ben Laden ou de confirmer définitivement qu’il se trouvait dans le compound avant le raid du commando US.
“On peut le créditer de son aptitude à déjouer l’espionnage,” a déclaré au Washington Post un ancien agent de la CIA au sujet du refus obstiné de ben Laden de mettre un pied dehors.
3. Ben Laden continuait à comploter
Les officiels US ont commence à donner des détails dans la soirée de jeudi sur le trésor que sont les documents découverts dans le compound de ben Laden à Abbottabad. Ces documents indiquent que malgré l’extrême lenteur de ses voies de communications, ben Laden continuait à diriger les opérations globales de son organisation terroriste, y compris des projets d’attentats contre des objectifs vulnérables aux Etats Unis.
Un bloc-notes manuscrit saisi pendant le raid du commando US contenait les grandes lignes d’un plan d’al Qaïda pour faire dérailler un train sur un pont, peut-être à Noël, ou pendant le discours du président Obama sur l’état de l’Union, ou pour le 10ème anniversaire des attentats du 11 septembre, a déclaré un officiel au new York Times.
De son côté, al Qaïda a apparemment mis hors jeu les théories de la conspiration selon lesquelles ben Laden est toujours en vie. L’organisation terroriste a confirmé la mort de ben Laden – et a promis de le venger. « Nous disons avec force que le sang du combattant de la guerre sainte, le cheikh Oussama ben Laden, Dieu le bénisse, nous est précieux ainsi qu’à tous les Musulmans et n’aura pas été versé en vain. Nous resterons, si Dieu le veut, une malédiction qui poursuivra les Américains et leurs agents, qui les suivra à l’intérieur comme à l’extérieur de leurs pays.
L’organisation a ajouté qu’un dernier message de ben Laden, dont elle dit qu’il a été enregistré la semaine dernière sera diffuse dans les prochains jours.
4. Le Pakistan savait-il?
C’est l’opinion du sénateur Démocrate du Michigan Carl Levin, président de la Commission sénatoriale des forces armées, qui ouvre une enquête parlementaire sur ce que le gouvernement pakistanais savait au sujet de l’enclave suburbaine de ben Laden. Elle se situait juste en bas de la route où se trouve l’académie militaire pakistanaise.
“Je pense qu’à haut niveau – l’échelon supérieur des services de renseignements - , ils le savaient, » a déclaré le sénateur Levin à ABC News. « Je ne peux pas le prouver. Je pense simplement qu’il est contre-intuitif de ne pas le penser. »
Un haut responsable de l’armée pakistanaise a averti que toute autre opération commando américaine de ce genre dans le pays serait une violation de la souveraineté pakistanaise et nuirait aux relations entre les deux pays. Pour l’instant, l’armée des Etats Unis n’a pas reçu de demande de retrait d’un seul de ses « un peu moins de 300 » soldats actuellement dans le pays, a déclaré vendredi aux journalistes le colonel Dave Lapan, porte parole du Pentagone,
“Nous n’avons été alertés d’aucune nouvelle décision sur la taille de nos effectifs au Pakistan,” a-t-il dit, ajoutant que leur nombre est fluctuant.“
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