Un retour vers la situation en Syrie où les troubles semblent s’étendre. La situation en Syrie est très dangereuse, non pas parce qu’un mouvement démocratique pourrait mettre un terme à des années de régime autocratique sous la direction du parti Baath, mais plutôt par l’utilisation possible du mécontentement populaire par des forces qui ne sont pas plus démocratiques que le parti actuellement au pouvoir à Damas.
Joshua Landis revient en détail sur un des éléments qui sert à la propagande contre le régime de Damas et qui vise avant tout à plonger le pays dans le chaos et , pourquoi pas, à légitimer une intervention étrangère sur le modèle de ce qui se passe en Libye.
Car si ce qui se passe en Syrie ressemblait beaucoup au début à la situation en Tunisie, avec des troubles débutant dans une zone périphérique et appauvrie du pays, la Syrie se trouve maintenant devant un scénario qui pourrait effectivement ressembler à celui de la Libye ou de l’Algérie de 1988. Et les incidents décrits par Landis rappellent beaucoup ce qu’a connu l’Algérie, avec l’action d’hommes armés inconnus qui tiraient tantôt sur les foules de manifestants, tantôt sur les forces de police.dans le but de provoquer le chaos. Dans le cas syrien, cependant, il faut noter le rôle joué par les opposants établis à l'étranger, notamment parmi la nombreuse et opulente diaspora syrienne à l'étranger. Et comme souvent, on notera encore l'intérêt de la manipulation de ce que Marx et Engels appelaient le "lumpen - proletariat".
C’est que le régime syrien est non seulement confronté au mécontentement populaire, mais également à une opposition structurée qui comprend entre autres d’anciens baathistes (comme par exemple le propre oncle du président Bachar al-Assad) où les Frères Musulmans qui avaient été écrasés dans le sang en 1982. Et il n’est pas sûr du tout que Bachar al-Assad fasse forcément l’unanimité dans les rangs du régime, lui qui semble avoir été sincèrement surpris par l’ampleur du mécontentement que par la dureté de la répression exercée par ses services.
Faute d’avoir voulu et pu réformer à temps, le président Syrien se voit désormais devant un casse-tête dont il est difficile de savoir s’il parviendra à le résoudre. Car aujourd’hui, la seule réforme qui vaille, c’est celle qui signifie la fin du régime et on ne voit pas comment el-Assad et ses amis pourraient s’y résoudre. Le problème étant aussi que toute réforme partielle ne pourra être jugée qu’insuffisante, tout en étant en même temps un aveu de faiblesse.et donc de nature à encourager la contestation.
L’accroissement de la répression semble donc être la seule issue pour le régime. Et si le président el-Assad ne s’y résout pas, gageons que la Syrie connaîtra un coup d’Etat. A la différence du régime libyen, celui de Syrie aura les mains libres pour réprimer. Tout d’abord parce que c’est un régime qui convient aux autorités de tel Aviv : faible militairement et politiquement, il ne représente pas une menace véritable pour l’entité sioniste. Ensuite, si le régime syrien est aujourd’hui proche de l’Iran, l’Arabie saoudite comme les Etats Unis ne désespèrent pas de parvenir à distendre cette alliance. Ce n’est pas pour rien, me semble-t-il, si Mme Clinton considère le président de la république syrienne comme un réformateur. Al-Assad est peut-être un réformateur, mais son régime gêne surtout moins les Etats Unis qu’un régime qui verrait par exemple une prise de pouvoir des Frères Musulmans.
Et n’oublions pas que dans certains moments, les Etats Unis ont trouvé le gouvernement syrien à leurs côtés, par exemple pour sous traiter des cas de torture ainsi qu’il fut fait pour Maher Arar ou encore pour participer à la première guerre contre l’Irak en 1991.
Par Joshua Landis, Syria Comment (USA) 13 avril 2011 traduit de l'anglais par Djazaïri
Un certain nombre d’articles d’information de l’AFP, du Guardian et d’autres agences ou organes de presse donnent à penser que les forces dé sécurité syriennes sont responsables des tirs qui ont tué 9 soldats Syriens dimanche à Banias. Certaines versions affirment qu’ils ont été tués pour avoir refusé les ordres de tirer sur les manifestants.
De nombreuses preuves donnent à penser que ce n’est pas vrai et que les journalistes occidentaux transmettent des informations erronées.
- Témoignage du colonel Uday Ahmad. Ma femme a parlé ce matin avec un témoin qui a démenti cette histoire. C’st le colonel Uday Ahmed, beau-frère du lieutenant colonel Yasir Qash’ur qui a été tué par balles à Banias avec huit autres soldats Syriens le dimanche 10 avril 2011. Uday Ahmad était assis sur le siège arrière du véhicule que Yasir conduisait quand il a été tué par balles sur l’autoroute à l’extérieur de Banias. Uday affirme que les tirs provenaient de deux directions. Des tirs venaient du toit d’un bâtiment face à l’autoroute et l’autre et d’autres de personnes cachées derrière la glissière en ciment au milieu de l’autoroute. Ils se sont levés d’un bond et ont tiré sur les deux camionnettes qui transportaient des soldats Syriens, en tuant 9. Le colonel Uday a survécu.
Voici la vidéo de la fusillade présentée sur la télévision syrienne, envoyée par mon beau frère Firas qui réside à Lattaquié.
La vidéo d’un soldat supposé avouer s’être fait tirer dans le dos par des membres des forces de sécurité et mise en lien par le Guardian a été interprétée de manière complètement fausse. Le Guardian répète de manière irresponsable une interprétation mensongère de la vidéo que lui a fournie un informateur.
1. Le Guardian écrit “Une vidéo sur YouTube montre un soldat blessé qui affirme s’être fait tirer dans le dos par les forces de sécurité.La vidéo ne “confirme” pas l’histoire que nous relate le Guardian. Le soldat dément avoir reçu l’ordre de tirer sur les gens. Il dit par contre qu’il était en route pour Banias afin de faire respecter l’ordre. Il ne dit pas qu’il s’est fait tirer dessus par des agents du gouvernement ou des soldats. Il le réfute. Celui qui l’interviewe essaye de lui suggérer ce qu’il devrait dire, mais le soldat dément nettement l’histoire que l’interviewer essaye de lui faire avouer. Dans la vidéo, le soldat blessé est entouré de personnes qui tentent de l’amener à dire qu’il s’est fait tirer dessus par un officier de l’armée. Le soldat dit clairement, « Ils [nos supérieurs] nous ont dit, « Tirez sur eux si ils vous tirent dessus. »En demandant au soldat blessé, “Quand vous ne nous avez pas tire dessus, que s’est-il passé?” l’interviewer a essayé de lui faire dire au soldat blessé qu’il avait refusé l’ordre de tirer sur les gens. Mais le soldat ne comprend pas la question parce qu’il vient juste de dire qu’il n’a pas reçu l’ordre de tirer sur les gens. Le soldat répond, « Rien, les tirs se partis de tous côtés. » L’interviewer répète sa question autrement en demandant, « Pourquoi tiriez-vous sur nous [alors que] nous sommes Musulmans ? Le soldat lui répond, « Je suis Musulman aussi. » L’interviewer demande, « Alors pourquoi tiriez-vous sur nous ? » Le soldat répond, « Nous n’avons pas tiré sur les gens. On nous a tiré dessus au niveau du pont. »
Alix van Buren, un journaliste chevronné de la Repubblica, le plus grand journal italien, se trouve à Damas et m’envoie les infos suivantes sur le possible rôle d’agitateurs armés de Khaddam à Banias.
Josh, la situation est extrêmement confuse et il est souvent impossible de confirmer ce qu’on trouve sur le web. L’absence de la plupart des media étrangers ici en Syrie ajoute à l’opacité. Ce que je peux dire sur cette question de « l’immixtion étrangère » est ce qui suit, des citations directes de membres importants et respectés de l’opposition.Dimanche, deux hommes de l’ex-vice président Khaddam ont été arrêtés à Banias. Un militant des droits de l’homme a confirmé. Un militant des droits de l’homme a confirmé qu’ils semaient le désordre en distribuant de l’argent et des armes. Je ne sais pas quelle crédibilité accorder aux aveux faits par trois individus montrés à la télévision syrienne aujourd’hui. Cependant, plusieurs dissidents Syriens croient à la présence et au rôle « d’infiltrateurs ». Michel Kilo, quoiqu’il accepte cette possibilité, avertit que le problème des « infiltrés et des conspirations » ne devait pas être exploité pour faire obstacle à une rapide transition vers la démocratie.Haytham al-Maleh a été le plus explicite en désignant l’immixtion des hommes de Khaddam à et autour de Banias. Il a aussi mentionné ces « chiens perdus » loyaux à Rifa’t al-Assad. Selon lui, ils sont particulièrement actifs le long de la côte entre Tartous et Lattaquié. Ici, un lien vers mon interview d’al-Maleh pour La Repubblica.Le blogueur pionnier Ahmed Abu Elkheir, malheureusement en prison pour la deuxième fois en moins d’un mois, et pas encore libéré, a des attaches à Banias. Les premières manifestations pacifiques de samedi matin étaient aussi motivées par la demande qu’il soit libéré. Dans son profil Facebook, avant son arrestation, il s’en prenait lui aussi à Khaddam. Plusieurs auteurs de commentaires de cette région étaient d’accord avec lui, vilipendant Khaddam pour jouer « avec le sang de personnes innocentes. »
Finalement, que pensez-vous des propos de Haytham al-Manna de Paris tenus sur al Jazeera?Il y a beaucoup de buzz par ici à ce sujet, même si les media occidentaux ne semblent pas encore s’y être intéressés. Voir le texte en arabe sur Al Watan. Manna dit en substance qu’il a été approché par un groupe d’hommes parmi lesquels se trouvait un homme d’affaires Syrien muni d’un passeport étranger, qui lui a demandé de faciliter la distribution d’argent et d’armes aux jeunes manifestants. Il est faut vaguement référence à une personne su groupe liée à un « important pays arabe du Golfe. » Al-Manna est originaire de Dera’a et si ce qu’il a dit est confirmé, son origine rend la situation encore plus significative. Il aurait diffusé un avertissement aux habitants de Dera’a pour qu’ils n’acceptent pas des offres en argent ou en armes de quiconque.J’essaye d’obtenir directement auprès de lui confirmation de ce qui précède.
Voir aussi mon entretien avec Suhair al-Atassi
Post scriptum pour ces notes précédentes envoyé par Alix Van Buren:
J’ai finalement pu joindre Haytham Manna à paris. Il a confirmé l’article d’Al-Watan et a ajouté quelques précisions. Il a parlé de trois groupes qui l’ont contacté pour fournir des armes et de l’argent aux rebelles en Syrie. D’abord, un homme d’affaires Syrien (l’histoire rapportée par Al-jazeera) ; ensuite il a été contacté par plusieurs opposants Syro-Américains pour employer ses propres mots (il parlait de plus d’un individu), il mentionne en troisième lieu des approches de cette même sorte de « Syriens au Liban qui sont loyaux envers un parti libanais qui est contre la Syrie. » Il veut sans doute parler du parti de Hariri. Mais c’est mon hypothèse à moi parce qu’il a tout simplement refusé de donner des noms parce que, m’a-t-il dit, il ne veut pas entrer dans « les contrastes libano-libanaises » [en français dans le texte, NdT]. Mais quand j’ai prononcé ce nom [Hariri] en lui demandant d’exprimer pleinement sa pensée, il ne m’a pas contredit. Il a évoqué aussi d’autres nationalités qui « s’immiscent » dans la rébellion syrienne. Il a affirmé que « l’intifadat karama », l’intifada de la dignité est une affaire « purement syrienne » et que personne, « ni Jordaniens, ni Libanais ou saoudiens » ne devaient interférer. « C’est une affaire que les Syriens doivent résoudre entre eux. »Il a été aussi extrêmement ferme pour dire que quiconque donne de l’argent et des armes aux rebelles Syriens les « pousse au suicide » parce que « la confrontation avec l’appareil sécuritaire ne peut pas être gagnée par des affrontements armés. La puissance de feu tout comme les effectifs de l’armée plus des services de sécurité (qu’il évalue à 2,5 millions au total) sont écrasants. », dit-il. Selon lui, les jeunes ne peuvent gagner que par la non-violence. Il admet qu’il y a des gens proches de Khaddam et de Rifa’t le long de la côte, mais il pense qu’ils sont très peu nombreux – quelques dizaines – et que les deux exilés Syriens n’ont pas vraiment de base politique pour les soutenir. Les gens qui créent des troubles et reçoivent de l’argent ç cette fin sont, selon lui, de simples « misérables » [en français dans le texte, NdT], des « déclassés qui agissent ainsi pour de l’argent. »Tout ce qui précède correspond au discours tenu actuellement par l’opposition syrienne.
Un document de trois pages supposé être un memo « top secret » des Mukhabarat, instruisant les agents des services de renseignements que « il est acceptable de tirer sur certains membres des services de sécurité ou officiers de l’armée afin de mieux tromper l’ennemi » a été publié sur internet et repris par all4Syria. Une copie de ce memo accompagnée d’une traduction m’a été envoyée par le journaliste d’un magazine très connu qui voulait avoir mon opinion. Il est tâché de sang et c’est manifestement un faux. Après tout, quelle armée pourrait survivre si ses officiers supérieurs publiaient des ordres de tirer sur ses propres officiers ? Pas très bon pour le moral des troupes.
L’AFP et d’autres agences de presse ont cité des membres de l’opposition à Banias qui insistent pour dire que les neuf officiers et soldats de l’armée syrienne ont été tués par les forces gouvernementales à Banias. Ils prétendent aussi que les inconnus qui ouvrent le feu sur les gens sont des agents du régime.
“Banias est cernée par des blindés. Personne ne peut y entrer ou en sortir. C’est comme une prison, » déclare Yasser, un commerçant. « Les forces de sécurité sont responsables pour avoir tué les soldats à Banias parce qu’ils avaient refusé d’attaquer la ville, » ajoute-t-il – une version très différente de la version officielle.
L’agence officielle de presse Sana avait annoncé que neuf soldats, dont deux officiers, avaient été tués lundi quand leur patrouille est tombée dans une embuscade près de la ville.L’armée encercle Banias depuis lundi, quand de mystérieux agents du régime ont ouvert le feu sur les habitants, notamment devant des mosquées, tuant quatre personnes et en blessant 17…
Par Katherine Marsh – un pseudonyme – à Damas, The Guardian mardi 12 avril 2011
Des témoins affirment que des soldats qui ont désobéi aux ordres à Banias ont été tués par les services de sécurité alors que la répression contre la contestation s’intensifie.Des soldats Syriens ont été tués par les services de sécurité pour avoir refuse de tirer sur les manifestants, indiquent des témoins, tandis que la répression contre les manifestations anti-gouvernementales s’intensifie.Des témoins ont déclaré à al-Jazeera et à la BBC que certains soldats avaient refuse de tirer après l’entrée des l’armée dans Banias après les grandes manifestations de vendredi.Les observateurs des organisations des droits de l’homme ont cité Mourad Heijo, un conscrit originaire du village de Madaya, comme étant un de ceux tombés sous les balles des tireurs des services de sécurité. 3les membres de sa famille et de son village disent qu’il; a refusé de tirer sur ses compatriotes », affirme Wassim Tarif, un observateur local des droits de l’homme.
Une vidéo sur YouTube montre un soldat blessé disant qu’iI a été touché dans le dos par les services de sécurité, tandis qu’une autre vidéo montre les funérailles de Muhammad Awad Qunbar dont des sources disent qu’il a été tué pour avoir refusé de tirer sur les manifestants. Des signes de défection ne peuvent que préoccuper le régime syrien. La presse d’Etat a rapporté une version différente des événements, affirmant que neuf soldats avaient été tués dans une embuscade tendue par un groupe armé à Banias. Des militants disent que les soldats qui ont été déclarés tués ou blessés ne l’ont pas tous été après avoir refusé de tirer sur les manifestants. « Nous enquêtons sur des informations selon lesquelles certaines personnes ont des armes et s’en sot servi pour se défendre, » déclare Tarif…
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