jeudi 25 octobre 2012

Après le sondage du Figaro sur l'Islam et les musulmans, on attend un sondage sur le judaïsme et les juifs


Le journal Le Figaro vient de publier les résultats d'un sondage selon lesquels:

L'image de l'islam se dégrade fortement en France

avec
un durcissement supplémentaire des Français vis-à-vis de cette religion et d'une perception négative renforcée de l'islam. Même si une proportion non négligeable de Français, 40 %, continue à se dire indifférente à la question de la présence de l'islam en France.»
Selon Jérôme Fourquet de l'IFOP, l'institut qui a réalisé le sondage:
Ce qui explique, à ses yeux, un tel durcissement - 43 % des sondés considèrent l'islam comme une «menace» - est lié à une «visibilité» fortement accrue de l'islam sur la scène publique et médiatique. «Ces dernières années, il n'est pas une semaine sans que l'islam, pour des questions sociétales, voile, nourriture halal, ou pour une actualité dramatique, attentats, ou géopolitique, n'ait été au cœur de l'actualité.» D'où cette autre impression: 60 % pensent que cette religion a désormais «trop d'importance». Ils étaient 55 % il y a seulement deux ans. Ceux qui se disaient indifférents à cette question passent de 41 à 35 %.
Je me disais qu'il serait intéressant (ou de très mauvais goût) que le journal Le Figaro convoque un sondage du même type sur le judaïsme, en adaptant au besoin le questionnement proposé aux sondés. par exemple, en leur demandant si cette religion et ses adeptes ne sont pas trop présents dans tel ou tel domaine de la vie publique et économique, reproches qui étaient communément adressé aux Juifs par une fraction de l'opinion publique entre les deux guerres.

Olivier Roy faisait déjà ce genre de réflexion dans un entretien accordé au Nouvel Observateur suite à un sondage du même type pratiqué par l'institut CSA en 2009.
Quand on dit qu'on ne tire pas assez de leçons de l'histoire, c'est un euphémisme. Encore faudrait-il qu'on enseigne l'histoire et pas des mythes.

"Les mêmes questions se posaient avec la pratique du judaïsme"

Le Nouvel Observateur,  le 10-12-2009

Un sondage CSA publié jeudi 10 décembre semble montrer une spécificité de la perception de l'islam par les Français. Alors que les religions catholique et juive sont jugées compatibles avec la vie en société pour 82% et 72% des Français, seuls 54% d'entre eux estiment que la pratique de la religion musulmane s'accorde avec le mode de vie français.
Nouvelobs.com donne la parole à Olivier Roy, professeur à l'Institut universitaire européen de Florence.

Selon vous, la pratique de l'islam est-elle compatible avec la vie en société en France ?
- Evidemment. Les plus de 5 millions de musulmans en France le prouvent. Le problème est qu'en ce moment certaines personnes essaient de définir une sorte d'islam libéral (qui validerait l'homosexualité, par exemple), alors que cela n'existe pas. De même que le catholicisme libéral n'existe pas. La religion est ce qu'elle est. Ce sont les pratiques de la religion qui diffèrent. Il y a trente six manières de pratiquer l'islam.
Le sondage pose une question à laquelle il faut répondre par oui ou par non, elle ne peut donc pas rendre compte de la compatibilité des pratiques, mais plutôt du rapport des gens à l'image qu'ils ont de l'islam.
Comment expliquer cette perception négative de l'islam en France et en Europe ?
- Par sa nouveauté. L'islam est intégré en Europe seulement depuis trente ans. Si on regarde la presse française, dans les années 30, les mêmes questions se posaient avec la pratique du judaïsme. La pratique israélite était intégrée, mais pas celles des nouveaux arrivants. Ils étaient qualifiés de métèques quotidiennement. Il n'y avait pas besoin de lire les pamphlets antisémites de Céline pour trouver ce genre d'expression. Aujourd'hui, à travers ces sondages, c'est un discours tout à fait théorique qui est relayé selon lequel le musulman est un immigré, alors que l'intégration est faite, et depuis des années.
Pensez-vous que le débat sur l'identité nationale présenté par le gouvernement influence cette perception ?
- C'est un discours purement idéologique et politique (car il n'aura aucune traduction dans la législation) qui crispe un débat qui a lieu depuis des années d'un point de vue pratique. Quand Eric Besson dit qu'il y a un fort intérêt pour son débat, qu'il y a une forte participation, ce n'est pas vrai. Les gens ne sont pas dupes. Ils connaissent bien la réalité : en France la mixité est très forte. Le discours qui consiste à considérer les musulmans comme des étrangers est totalement abstrait. Le président de la République fait comme s'il fallait séduire un électorat, mais en fait il n'a pas compris cette réalité. Il a 20 ans de retard. Comme lui, le président du Conseil français du culte musulman, Mohammed Moussaoui, considère que l'Europe est une terre chrétienne. Les promoteurs de la vision culturaliste qui consiste à associer la religion à la culture se trouvent donc des deux côtés. Alors que cette vision est dépassée.
Les élus locaux connaissent-ils mieux cette question ?
- Oui. Ils ont une pratique beaucoup plus subtile. Ils constatent que la mixité a lieu. La question des minarets, par exemple, a lieu au sein des mairies depuis les années 80. Les maires, connaissent bien la question et se la pose en termes de compatibilité architecturale. Dans cette réalité, les musulmans sont perçus comme des citoyens français et non comme des immigrés.
La religion doit-elle rester dans la sphère privée ?
- Pas du tout. A aucun moment la loi de 1905 sur la laïcité ne le laisse entendre. Ce serait une vision idéologique de la laïcité. Par ailleurs, les minarets ont été créés par symétrie aux clochers. Mais ces derniers ne sont pas évoqués dans la Bible, ils apparaissent plus tard, et sont culturels. C'est pour cela que l'interdiction des minarets est discriminatoire. En revanche, il n'a jamais été question d'autoriser l'appel à la prière par le muezzin, de même que la sonnerie des cloches est très réglementée, et n'est permise que lorsque la tradition le justifie. Si une nouvelle église s'implante et fait sonner ses cloches, vous pouvez faire appel à la jurisprudence pour porter plainte.
Propos d'Olivier Roy recueillis par Donald Hebert
le jeudi 10 décembre (Nouvelobs.com)

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