vendredi 2 janvier 2009

Gaza : devons nous être déçus par le silence d'Obama?

D’aucuns s’étonnent du silence d’Obama sur les événements en cours auMoyen-Orient. Cet étonnement ne peut se comprendre que par la somme d’espoirs qui été placée sur cet homme aussi bien sur la question du conflit palestino-sioniste que sur d’autres sujets comme l’emploi dans son pays ou la protection sociale.

Ce silence a d’autant plus étonné qu’Obama n’a guère hésité à s’exprimer sur le sauvetage des banques en déroute suite à la crise des subprimes.

Je dirais personnellement que ce silence est plutôt rassurant si on le situe dans son contexte. Dans l’affaire du renflouement du système bancaire, il y avait d’abord une urgence vitale pour les Etats-Unis et accessoirement pour le monde. Par ailleurs, les deux présidents, l’actuel George W. Bush et celui à venir, Obama, étaient d’accord sur les modalités d’intervention de la puissance publique.

S’agissant de ce qui se passe actuellement à Gaza, George W. Bush est allé aussi loin que d’habitude dans le soutien qu’il apporte à l’entité sioniste, c’est dire que ce soutien est total et que les victimes palestiniennes n’ont qu’à s’en prendre au Hamas.

Or diverses analyses publiées dans la presse anglophone, dont celui que je vous propose un peu plus loin, insistent sur le moment choisi par les sionistes pour attaquer Gaza : juste avant les élections générales au Sionistan et la prise de fonctions d’Obama. L’idée étant que l’attaque vise à mettre Obama, un homme qui n’inspire pas une confiance totale chez les sionistes, devant un fait accompli, une situation explosive qu’il ne pourra traiter qu’en prenant lui aussi parti résolument pour Sion.

On verra si ce calcul est bon, mais l’article de Rosa brooks, comme d’autres, sonne comme une mise en garde à Obama et une invitation à ce que ce dernier sorte les USA de leur torpeur (to wake up from its long slumber) et à ne plus signer de chèque en blanc aux dirigeants sionistes.

Or je ne peux m’empêcher que si Obama n’a pas pris la parole, c’est simplement parce qu’il n’est pas entièrement sur la même longueur d’ondes que son futur prédécesseur.

Et que, c’est bien connu, il n’est pas possible à un futur chef d’Etat de manifester une divergence d’opinion au moment où une crise qui concerne son pays se déroule à l'étranger.

Ou alors, je suis simplement trop naïf...

Israël ne tracera pas sa route vers la paix à coup de bombes

L’attaque contre Gaza a plus à voir avec sa politique intérieure qu’avec sa sécurité nationale0 Les USA doivent se réengager avec force dans un processus de paix au Moyen-Orient.

par Rosa Brooks Los Angeles Times (USA) 1er janvier 2009 traduit de l'anglais par Djazaïri

1er janvier 2009

C’est une année nouvelle pour un monde ancien et sanglant.

En Israël, les politiciens en course pour le pouvoir ont lancé l’attaque militaire la plus létale sur le territoire palestinien depuis des dizaines d’années. Israël a justifié son bombardement de Gaza sur la base de la rupture par le Hamas d’un cessez-le-feu fragile et temporaire. Le gouvernement israélien a raison de considérer les attaques à la roquette du Hamas contre des civils Israéliens comme inexcusables, mais le moment de l’offensive israélienne a plus à voir avec des raisons politiciennes qu’avec n’importe quoi d’autre.


Ehud Barak, le ministre de la défense travailliste et Tzipi Livni, la ministre des affaires étrangères du parti centriste Kadima sont tous deux candidats au poste de premier ministre israélien à l’issue du scrutin du 6 février prochain. Une démonstration de « fermeté » contre le Hamas pourrait aider le parti travailliste et/ou Kadima à l’emporter contre le Likoud, le parti de droite de Benjamin Netanyahu qui est en tête dans les sondages. Dans le même temps, le ministre sortant Ehud Olmert, confronté à des accusations de corruption, n’a plus que quelques semaines pour redorer un blason en piteux état.

A ce facteur temps, s’en ajoute un autre qui est celui de la prise de fonctions prochaine du président élu Barack Obama. Tant que le président Bush était à la Maison Blanche, Israël pouvait compter sur une administration qui n’apportait pas un simple « soutien » à Israël mais le faisait aveuglément et de manière irréfléchie. Obama sera peut-être moins disposé à offrir des chèques en blanc à Israël. C’est pourquoi cette offensive militaire du Nouvel An a été prévue dans une fenêtre temporelle décisive avant les élections israéliennes et avant la prestation de serment d’Obama.

En termes strictement militaires, Israël « gagnera » cette bataille contre le Hamas. En dépit de toutes ses menaces et bravades, le Hamas est faible et ses armes - -le terrorisme, des missiles artisanaux – sont les armes des faibles. Depuis 2001, le Hamas a tiré des milliers de roquettes Qassam, dépourvues de guidage, sur Israël, mais ces roquettes n’ont tué qu’une poigne d’Israéliens.

Ce qui contraste avec l’armée israélienne qui est une des plus modernes et des plus efficaces au monde (grâce en partie aux 3 milliards de dollars annuels d’aide étatsunienne). Israël peut facilement contenir l’étroite bande de Gaza et ses 1,5 millions d’habitants. Ce samedi, premier jour de l’offensive, les bombes israéliennes ont tué au moins 180 Palestiniens. Mercredi, le bilan des palestiniens tués dépassait 390.

Mais s’il n’y a aucune raison de douter de la capacité d’Israël à pulvériser Gaza, il n’y a aucune raison non plus de penser que cette offensive améliorera la sécurité d’Israël. La destruction des infrastructures du Hamas peut temporairement faire cesser les tirs de missiles du Hamas, mais tôt ou tard ils reprendront.

L’attaque israélienne peut même renforcer le Hamas sur le long terme et affaiblir plus encore son rival non religieux, le Fatah. Comme Israël devrait déjà le savoir (comme nous devrions tous le savoir), larguer des bombes sur des zones densément peuplées est une excellente méthode pour radicaliser les civils et les amener à se rassembler derrière leurs dirigeants, quelles que soient leurs erreurs.

L’ironie veut que ce soit précisément sur un processus psychologique de ce genre chez les Israéliens que comptent Olmert, Barak et Livni mais dont ils ne semblent pas supposer l’existence chez les Palestiniens. (Ou, pire, ils sont trop cyniques pour s’en préoccuper du moment qu’ils retirent un profit politique).

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Israël n’a pas d’issue politique viable ici : Il n’y a tout simplement pas d’itinéraire clair entre les bombardements et une paix durable. Mais les dégâts causés par cette nouvelle conflagration ne se limiteront pas aux Palestiniens et aux Israéliens. L’offensive israélienne a déjà provoqué indignation et manifestations dans tout le monde arabe. La crise actuelle risque aussi de déstabiliser certains des gouvernements les plus modérés de la région – l’Egypte par exemple – dont les dirigeants sont dès maintenant confrontés à des réactions violentes s’ils ne coupent pas les ponts avec Israël.

Et si vous croyez que rien de tout ça ne nous concerne vraiment ici aux USA, vous vous leurrez vous-même. La colère arabe et musulmane au sujet de la Palestine continue à alimenter le terrorisme anti USA et anti Occident dans le monde entier.

Il est temps pour les Etats-Unis de se réveiller de leur longue torpeur et de se réengager avec force dans le processus de paix au Moyen-Orient. Seuls les Etats-Unis – premier soutien d’Israël et principal soutien financier – peuvent exercer une pression à même d’amener à faire les difficiles choix nécessaires pour leur propre sécurité à long terme, de même que pour celle de la région. En janvier 2001, les négociations de Taba entre Israël et l’Autorité Palestinienne sont passées tout près d’un règlement définitif mais les discussions furent rompues après l’élection d’Ariel Sharon comme premier ministre le 6 février 2001. Sharon refusa de rencontrer Yasser Arafat et George W. Bush, le président nouvellement élu, ne voyait pas de raison à pousser Israël à faire la paix.

Huit ans plus tard, Israël est devant une nouvelle élection et nous sommes tout proches de la prestation de serment d’un nouveau président. Quand il prendra ses fonctions, Obama devra faire pression sur les deux parties, israélienne et palestinienne pour qu’elles reviennent à la négociation avec les accords abandonnés de Taba comme point de départ. Et ce, pour une année 2009 moins sanglante.

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