Un article quelque peu singulier au milieu du flot de propagande contre le gouvernement syrien et en faveur de l’opposition armée. La BBC nous parle en effet d’habitants de Damas, des Irakiens pour l’essentiel, qui ont fui les exactions des prétendus combattants de la liberté de l’Armée Syrienne Libre.
par Rami Ruhayem ,BBC News (UK) traduit de l'anglais par Djazaïri
Bagdad - En fin de soirée, un autobus rempli d'Irakiens est arrivé à Bagdad après un voyage de 12 heures à travers le désert.
Avec un mélange de colère et de résignation, ils disent avoir été forcés de quitter leurs maisons près de Damas par des groupes armés d'opposition.
«L’Armée Syrienne Libre a détruit nos vies, » déclare un Irakien qui vient juste d’arriver avec son épouse syrienne et sa fille.
Le quartier porte le nom de la petite-fille du prophète Mahomet, qui est censée être enterrée dans la mosquée de Sayyida Zainab.
Le quartier est populaire auprès des pèlerins chiites du monde entier, et abrite de nombreux réfugiés irakiens, chiites en majorité.
"Ils nous ont expulsés», dit-elle, en regardant la caméra d’un air de défi. Elle était au bord des larmes, mais a refusé de craquer.
"Ce n’est pas une armée, ce ne sont que des gangs. Il ya une seule armée, l'armée arabe syrienne, et elle est en droit de protéger les gens et le pays. Elle contrôle Damas."
«Jouer la carte du sectarisme»
Je lui ai demandé pourquoi elle est partie si elle pense que l’armée a gardé le contrôle.
«Parce que nous craignons pour nos enfants. Ils jouent la carte du sectarisme, particulièrement à Sayyida Zainab.»
Une autre femme décrit une fuite épuisante de Damas.
" La nuit dernière, nous n'avons pas dormi Nous avons attendu dans la rue jusqu'à l'aube pour pouvoir partir. Les gens ont simplement pris leurs enfants -. Afghans, Irakiens, Syriens, tous sont montés dans des voitures et sont partis, sans savoir où," dit-elle .
Ceux qui ont réussi à prendre un bus sont venus en Irak Ceux qui n'ont pas pu-. Que Dieu les protège - je ne sais pas ce qu(ils sont devenus."
Un des réfugiés m’a expliqué avoir vu des tracts à Sayyida Zaina intimant aux Irakiens l’ordre de partir sous trois jours.
Un autre dit que toute une famille afghane a été tuée par balles dans sa maison.
Beaucoup de ces Irakiens étaient en Syrie depuis une bonne dizaine d’années, et d’autres depuis 2006 et 2007 quand l’Irak avait sombré dans sa propre guerre civile.
Leur histoire et la façon dont ils la relatent offre un instantané d’une évolution lente et presque parallèle en Syrie et en Irak ; l’achèvement d’une ère de dictature baathiste et, ce que beaucoup craignent, la montée à la place d’un sectarisme virulent.
‘Chez moi’
Un des Irakiens sortis de l'autobus m'a dit qu’un homme qu'il connaissait, un disciple du religieux chiite Moqtada al-Sadr, a été abattu l’Armée Syrienne Libre à dominante sunnite.
Qu’en est-il, lui ai-je demandé, des rumeurs qui ont circulé pendant des mois sur des hommes d’al-Sadr qui combattaient aux côtés du régime en Syrie ?
La foule autour de moi m’a opposé immédiatement et collectivement un démenti, et un jeune homme m’a même offert une contre-rumeur.
"Oui. Il ya des combattants Irakiens en Syrie», a-t-il dit, en observant avec satisfaction l'expression de surprise sur mon visage
"Les commandants de l'Armée Syrienne Libre sont tous irakiens", me dit-il avec un regard pénétrant et un léger signe de tête, pour m'assurer que je saisis la nuance - les sunnites irakiens, tel était le sous-entendu.
C’était une caractéristique frappante de la descente dans la division sectaire, la disposition à croire les pires choses au sujet des autres, avec ou sans preuves, et de ne pas admettre quoi que ce soit de négatif sur son propre groupe d’appartenance.
Au moment où tout le monde se préparait à quitter la gare routière, la femme syrienne m’a demandé de ne pas utiliser l’entretien enregistré sur caméra parce qu’elle voudrait retourner en Syrie et qu’elle craint des représailles pour ce qu’elle a dit.
Mais pourra-t-elle rentrer de si tôt ? lui ai-je demandé.
«Je ne peux pas rester éloignée » a-t-elle répliqué, les larmes aux yeux. «C’est chez moi.»
Dans ses bras, un enfant de trois ans ensommeillé qui désire seulement dormir – la fille d’une mère syrienne sunnite et d’un père chiite irakien, ballottés entre deux pays qui semblent être en compétition pour aller vers le précipice.
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