Un internaute, Philippe, conclut "les juifs ne sont pas une race ce que prétendaient les partisans de l'apartheid. je vous signale d'ailleurs que les principaux blancs contre l'apartheid étaient des juifs ou, comme on dit sur ce site."
Je ne conteste pas que parmi les Blancs qui luttaient contre l'apartheid figuraient de nombreux Juifs comme Joe Slovo ou Ronnie Kasrils. Je me bornerai cependant à remarquer qu'ils n'étaient pas sionistes. Kasrils, qui se porte encore bien, n'a pas trahi ses idées anticolonialistes. A aucun moment on n'a postulé ici l'identité entre sionisme et judaïsme.
Je ne conteste pas que parmi les Blancs qui luttaient contre l'apartheid figuraient de nombreux Juifs comme Joe Slovo ou Ronnie Kasrils. Je me bornerai cependant à remarquer qu'ils n'étaient pas sionistes. Kasrils, qui se porte encore bien, n'a pas trahi ses idées anticolonialistes. A aucun moment on n'a postulé ici l'identité entre sionisme et judaïsme.
Maintenant, le judaïsme est-il une race ou une religion?
Philippe s'insurge contre cette question qui heurte effectivement une tradition française. Les Juifs Français par exemple, avaient accueilli très favorablement la révolution française qui leur donnait la qualité de citoyens égaux en droit et en devoirs; et par la même l'occasion d'échapper à la tutelle pesante du rabbinat. Je ferai simplement remarquer que la France n'est pas le monde et qu'en Europe orientale, en Russie nommément, les juifs ont été considérés comme une nationalité au même titre que les Musulmans par exemple. C'est dans ce terreau d'Europe orientale qu'est né le sionisme politique.
Cette question du judaïsme comme race a défrayé la chronique [juive] tout récemment au Royaume Uni, ce bon vieux pays totalitaire.
De quoi retourne-t-il?
Tout simplement qu'une famille juive s'est vue refuser l'inscription de son enfant dans une école confessionnelle juive au motif que la maman était une convertie et que sa conversion n'était pas reconnue par la tendance orthodoxe [et majoritaire dans le monde juif] de cette école.
Et que cette famille a décidé de poursuivre en justice l'école en question pour infraction à la législation sur la discrimination raciale. Et que l'école a été condamnée pour avoir exclu des enfants non considérés comme ethniquement juifs du fait que leur mère n'est pas considérée comme juive (malgré une conversion!).
C'est bien le seul cas d'une religion où un acte de foi ne peut pas vous valoir la qualité d'adhérent de cette religion et est subordonné à un critère de lien de sang.
Alors à la question le judaïsme est-il une race ou une religion, la Cour Suprême britannique a répondu: il s'agit d'une "race" et les institutions juives ne sauraient donc discriminer à raison d'un motif racial, car c'est illégal. L'article oppose d'ailleurs cette pratique à celle des écoles catholiques qui demandent un certificat de baptême, ce qui ne se transmet pas par le sang.
Le judaïsme est-il une race ou une religion?
par Sholto Byrnes, The New Statesman (UK) 17 décembre 2009 traduit de l'anglais par Djazaïri
Les tribunaux commencent à en décider
Selon le verdict rendu hier par la Cour Suprême de Grande Bretagne, la JFS (anciennement Jewish Free School) du nord de Londres s'est rendue coupable de discrimination illégale en refusant l'inscription d'élèves dont elle ne considérait pas les mères comme des juives "convenables." Comme je l'avais déja écrit à propos de cette affaire, la décision d'inscrire ou pas les candidats dépendait de la reconnaissance par les services du Grand Rabbin de la qualité de juive de leurs mères - ce qui signifie plus précisément, juive orthodoxe. Ne saute-til pas immédiatement aux yeux qu'il serait juste que ceux dont les mères sont des Juives progressistes, libérales ou réformistes devraient pouvoir entrer eux aussi dans cette institution réputée?
Ceux qui n'aiment pas l'idée d'écoles religieuses se sont réjoui en bloc de cette décision en partant du principe qu'ils trouvent que tout critère d'admission religieux est détestable et discriminatoire. Mais nous nous trouvons désormais dans une situation où les écoles religieuses catholiques et musulmanes pourraient avoir une plus grande latitude pour déterminer l'éligibilité d'un élève que n'en disposera la JFS à l'avenir. Personne ne s'attend, par exemple, à ce que des écoles catholiques donnent la même priorité à des enfants d'Anglicans pratiquants. Mais la décision du tribunalsemble à coup sûr contraindre la JFS - une école orthodoxe - à âtre plus ouverte à d'autres branches du judaïsme.
Ce qui complique encore les choses est que le dossier a été plaidé sur la base de la discrimination ethnique, pas religieuse (raison pour laquelle je ne prends pas au sérieux la suggestion d'Ed Ball pour qui cette décision pourrait menacer les critères d'admission de toutes les écoles confessionnelles, conclusion alarmante à laquelle avait abouti le Daily Telegraph en conclusion de son article sur cette décision). La JFS, selon les attendus de la décision, a exclu des enfants qu'elle ne considérait pas ethniquement Juifs parce que, aux termes de la loi halachique, cette qualité n'est reconnue qu'à ceux qui ont une mère juive.
Comme le New York Times le rapporte, dans un article bien moins hystérique:
"Une chose est claire au sujet du critère matrilinéaire; c'est un critère d'origine ethnique," a affirmé Lord Phillips, président du tribunal, dans son arrêt rendu à la majorité des juges. Selon la loi, "Par définition, la discrimination basée sur ce critère est une discrimanation sur un principe racial."
Le Service de l'Education Catholique a déja riposté à la décision du tribunal en disant:
Ce qui constitue l'appartenance à une foi ou à une dénomination religieuse devrait être une matière à laisser à la détermination de cette confession. Que toute autre autorité envisage de le faire à la place du groupe religieux, ou qu'un corps extérieur à l'organisation religieuse affirme la prééminence de sa décision relative à l'appartenance religieuse est un état de fait triste et de nature à discréditer.
Mais il ajoute aussi: "Il importe, tout en signalant notre sympathie avec nos frères et soeurs Juifs, de rappeler que ce jugement ne devrait pas avoir d'impact sur les écoles catholiques. Parce que la définition du catholique repose clairement sur le baptême et non sur un quelconque aspect ethnique ou autre."
Notes ces quelques derniers mots, "aspect ethnique ou autre." L'argument selon lequel les Juifs constituent un groupe ethnique aux termes du race relations Act de 1976 et du Public Order Act de 1986 a été un facteur important dans un procès à Leeds cette année où deux hommes ont été condamnés d'incitation à la haine raciale contre les Juifs (je dois ajouter que si la nature antisémite des matériaux qu'ils ont publié ne fait pas de doute, ils font appel de leurs condamnations sur d'autres bases).
Témoin appelé en qualité d'expert pour trancher cette affaire, le professeur Dan Coh-Sherbok, est un homme d'esprit libéral, un universitaire distingué et rabbin d'une synagogue réformée. Il n'est pas dans sa nature de pratiquer la discrimination contre quiconque, et encore moins d'agir d'une manière contraire à la préservation et à la bonne santé de la communauté juive. Il me semble néanmoins que si ce cas devait faire jurisprudence, laissant entendre que la judéité devrait être considérée comme une question d'ethnicité, le simple fait d'avoir des écoles juives pourrait poser problème.
Le New york Times cite aussi David Lightman, un ancien élève de la JFS dont la famille a été affectée par la politique de recrutement de l'école. "'Dieu peut arranger ça', a déclaré Lightman. 'C'est un grand garçon; il est dans les parages depuis longtemps. Il peur décider qui est Juif et qui ne l'est pas.' "on peut bien essayer d'être d'accord avec lui, il n'empêche qye la décision de la Cour Suprême signifie que ce n'est plus seulement l'affaire de Dieu ou du Grand Rabbin. La loi aussi a désormais son mot à dire sur cette question, -- et c'est quelque chose dont toutes les personnes concernées devraient en fin de compte se mordre les doigts.
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