Je vous propose une dépêche de l’Agence France Presse qui, si elle a été intégralement reproduite (légèrement remaniée) dans le journal turc Cumhuriyet n’a pu semble-t-il se frayer un chemin en France que sur le journal La Dépêche.
Ce papier dit en substance que la ligne adoptée par les autorités d’Ankara à l’égard de la Syrie ne fait pas l’unanimité en Turquie et qu’elle est contestée aussi bien par des élus d’opposition que par l’universitaire Gökhan Bacik qui porte sa critique dans un journal proche du pouvoir.
Gökhan Bacik considère tout simplement que son pays a abattu toutes ses cartes trop vite et a agi « sans réfléchir » et n’a plus de moyen d’influer sur le régime syrien.
C’est exact, la seule chose que peut faire maintenant le gouvernement turc, c’est d’emboîter le pas à ses alliés de l’OTAN qui décideront pour elle ce que devra être son rôle, que ce dernier consiste simplement à être un sanctuaire pour l’opposition syrienne ou le fer de lance d’une action militaire contre la Syrie.
L'intransigeance turque à l'égard du régime de Damas contestée
AFP – La Dépêche (France) 23 février 2012
La Turquie a rompu net avec la Syrie face à la répression brutale de la contestation dans ce pays, mais elle aurait mieux fait de jouer les intermédiaires et maintenir le dialogue avec un régime qui résiste aux pressions internationales, affirment l'opposition et des commentateurs.
"La Turquie pourrait faire une percée importante en organisant une réunion à Istanbul avec l'opposition syrienne, les représentants de (Bachar) al-Assad, la Russie et l'Iran", déclare le leader de l'opposition, Kemal Kilicdaroglu, dans l'édition de jeudi du journal Hürriyet Daily News.
"Une intervention en Syrie pourrait bouleverser non seulement la Syrie mais aussi la Turquie, et provoquer de graves troubles au Proche-Orient", prévient le leader du Parti républicain du peuple (CHP, social-démocrate), qui ajoute: "Les gens se demandent si les acteurs mondiaux sont réellement du côté des droits de l'Homme".
Avec la Syrie, pays qui partage une frontière de 900 km avec la Turquie, le gouvernement islamo-conservateur de Recep Tayyip Erdogan a été placé devant une équation difficile: il a fallu abandonner dix ans d'étroite coopération politique et économique avec le régime de Damas pour prendre la défense des milliers de victimes de la répression.
Dans un premier temps, la diplomatie turque s'est livrée à d'insistantes tractations avec le régime baasiste syrien, pour l'inciter à lancer des réformes.
En vain. Et en septembre, la Turquie a fermé la porte. Elle a grandement facilité l'organisation d'une opposition syrienne, a accueilli des déserteurs sur son sol, et s'est associée aux décisions et condamnations arabes.
Une attitude qui s'explique notamment par les liens qui unissent Ankara et Washington.
Les deux pays membres de l'Otan sont "sur la même longueur d'onde sur la Syrie et réclament le départ du président (Bachar) al-Assad", a affirmé un diplomate américain en poste à Ankara, sous couvert d'anonymat.
Mais cette politique ne fait pas l'unanimité.
"Les diatribes anti-régime du gouvernement donnent l'impression que la Turquie est favorable à une intervention (armée) contre notre voisin. Le gouvernement se trouve dans l'impasse, avec cette attitude qui va au delà de celle de certains Occidentaux", estime Faruk Logoglu, député du CHP.
M. Erdogan exclut l'éventualité d'une intervention armée, mais il s'attaque régulièrement et avec virulence à celui qu'il qualifiait hier d'"ami".
"La Turquie a abattu toutes ses cartes en l'espace de quelques mois. Elle a agi dans la hâte, sans réfléchir", a indiqué à l'AFP l'universitaire Gökhan Bacik qui critique ouvertement la politique de son pays à l'égard de la Syrie, dans un article du journal pro-gouvernemental Today's Zaman intitulé: "La Turquie a-t-elle raté son coup dans la crise syrienne ?"
"Pour l'instant le régime syrien n'est pas prêt de partir ou d'être renversé", affirme ce professeur de sciences politiques, qui regrette qu'Ankara n'ait pas conservé des "canaux de dialogue et de communication avec Damas".
"Désormais", ajoute-t-il, "la Turquie n'a plus les moyens de peser sur le régime syrien".
La ligne dure adoptée par Ankara à l'égard de Damas a aussi provoqué des tensions avec les alliés du régime syrien, dont l'Iran et le gouvernement irakien.
Comme l'Iran, l'Irak est gouverné par des chiites alors que la Turquie est largement sunnite. Et la Syrie est dirigée par la minorité alaouite, une branche du chiisme.
M. Erdogan, un ancien islamiste, a adopté une diplomatie plus autonome sur la Syrie, invitant notamment l'été dernier Assad à inclure au gouvernement des ministres issus des Frères musulmans islamistes en échange de son soutien au régime, avait affirmé à l'époque à l'AFP un diplomate occidental.
Le plan avait été refusé par Damas et démenti par Ankara.
Dans un autre éditorial de Today's Zaman, le chroniqueur Sahin Alpay loue la "sympathie" turque à l'égard de l'opposition syrienne.
Mais il estime qu'Ankara doit "se tenir à l'écart de toute implication dans une intervention militaire unilatérale ou multilatérale, qui aboutirait sans doute, non seulement à une guerre civile en Syrie, mais à un conflit armé régional".
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire
Commentaires publiés après modération. Les propos injurieux, diffamatoires ou à caractère raciste ne seront pas publiés.