jeudi 29 avril 2010

Zapiro, le juge Goldstone et la bar-mitzvah

La presse francophone ne se bouscule apparemment pas pour rapporter les petites difficultés du juge Richard Goldstone dans son projet d'assister à la bar-mitzvah de son petit fils.
Ce peu d'empressement tient peut-être au fait que selon une officine sioniste spécialisée dans la lutte contre la "désinformation", les informations selon lesquelles le juge Goldstone serait empêché d'assister à cette cérémonie relevaient précisément de la... désinformation.
Pourtant, l'organisation sioniste d'Afrique du Sud a vraiment tenté d'empêcher le juge Goldstone d'assister à cette cérémonie à la fois religieuse et familiale, nous montrant ainsi les expédients auxquels a recours le sionisme: bannir celui par qui le scandale arrive de la vie communautaire, jusque dans des aspects qui relèvent purement et simplement de l'ordinaire de la vie familiale. Une forme d'excommunication ou de mise à mort symbolique, rien de moins.
Cependant, le juge Goldstone pourra assister à la bar-mitzvah de son petit fils après avoir néanmoins satisfait aux exigences de l'organisation sioniste. Tout cela est exposé dans ce petit article de Jews Sans Frontière et illustré par une planche de Zapiro, un dessinateur du Mail & Guardian, un journal d'Afrique du Sud. J'ai traduit la légende, mais l'effet du jeu de mot "barred mitzvah" ne peut pas être rendu par une traduction (barred signifie en effet interdite).

Quelle que soit la décision du garçon, son grand père sera semble-t-il présent à la bar-mitzvah. Il s'avère que la fédération sioniste sud africaine a décidé de ne pas tenir un piquet pendant cet événement spécial pour un garçon âgé de 13 ans. J'ai eu l'information par un courriel de Deborah Maccoby à la liste de diffusion Just Peace UK.

Mais jetons un coup d'oeil au courriel envoyé par le juge Goldstone au rabbin Michael Lerner:

    Michael,
   
Je suis heureux de t'informer qu'après avoir été contacté ce matin par des organisations communautaires juives, la déclaration suivante a été publiée par Wendy Kahn, la directrice du groupe des députés Juifs Sud Africains:
   
"Le SA Jewish Board of Deputies (SAJBD) a le plaisir d'annoncer que, après consultation avec toutes les parties concernées, un accord s'est fait pour confirmer la présence du juge Richard Goldstone a la prochaine cérémonie de bar-mitzvah de son petit fils.


  Il a été convenu qu'une rencontre dans les locaux de la fédération sioniste d'Afrique du Sud réunira le juge Goldstone et les dirigeants de la fédération sioniste d'Afrique du Sud et d'autres représentants communautaires juifs pour discuter la réponse de la communauté juive au rapport de la commission présidée par le juge Goldstone l'an dernier et pour que le juge Goldstone donne ses perspectives sur la question.


Il a été en outre confirmé que le juge Goldstone assistera à la bar-mitzvah de son petit fils que qu'il n'y aura pas de manifestations liées à la bar-mitzvah.


Le SAJBD demande respectueusement, à la lumière de l'accord obtenu, que toutes les parties cessent immédiatement toute activité publique sur ce sujet de sorte que la cérémonie de bar -mitzvah du jeune homme puisse retrouver le caractère privé et digne qu'elle mérite.

Incroyable! Le prix de la présence du juge Goldstone à la bar-mitzvah de son petit fils consiste en une rencontre avec la fédération sioniste sud africaine "pour donner ses perspectives sur la question" de son rapport. Moi qui pensais que ces gens ne pouvaient pas tomber plus bas que lors de leur soutien à l'agression contre Gaza elle-même. Combien j'avais tort.

mardi 27 avril 2010

Du Hodna à Sidi Mimoun

Ce blog n'a pas connu de mise à jour depuis quelques temps et certains s'en félicitent, l'attribuant à une panne d'inspiration où à des désagréments que j'aurais pu connaître.
Il n'en est rien. Je suis simplement parti en vacances et n'ai eu guère de temps à consacrer à ce blog, en dehors du tri de certains commentaires. J'étais précisément en Algérie où je me suis partagé entre le Hodna et un village au pied de Sidi Mimoun.
"Amis" sionistes, à vos cartes!
 A peine rentré, j'ai été comme il se doit, absorbé par le travail et la réactivation du blog devrait être une question de jours, le temps de reprendre le rythme.

vendredi 9 avril 2010

Pas de visa d'entrée aux Etats Unis pour ceux qui travaillent dans la centrale atomique sioniste de Dimona

Je l'ai déjà écrit, les temps changent pour l'entité sioniste. Et ils changent plus que certains veulent bien le croire, même aux Etats Unis. Je m'interrogeais ici même sur l'éventualité d'une épreuve de force entre le gouvernement Obama et le régime sioniste.
Cette épreuve de force a en fait déjà commencé et les sionistes pensent sans doute l'avoir emporté grâce au soutien déterminé que leur a apporté le Congrès des Etats Unis dûment stimulé par l'AIPAC, l'incarnation du lobby sioniste dans ce pays.
Obama a certainement modérément apprécié l'exhibition de la puissance de lobby dans sa capitale. S'il n'y a pas eu véritablement de réponse publique de l'administration Obama, on a quand même entendu des voix, comme celle du général Petraeus, pour s'inquiétér de l'avenir de la présence US au Proche Orient en raison d'une alliance avec le sionisme qui est à  terme nuisible aux intérêts de Washington.
Pas de réponse publique donc, mais un geste significatif tel que celui exposé dans ce petit article qui reprend des informations du journal sioniste Maariv.


L'administration Obama refuse des visas à des scientifiques Israéliens spécialisés dans le nucléaire
par Roger L Simon, Pajamas Media (USA)  8 avril 2010 traduit de l'anglais par Djazaïri

L'administration Obama vient de refuser des visas d'entrée à des scientifiques israéliens qui travaillent dans la centrale atomique de Dimona. Cette inversion saisissante d'une politique traditionnelle a été rapportée le 7 avril 2010 par le site web du journal Maariv.

Ce pourrait être une pomme de discorde de plus dans des relations de plus en plus délicates entre l'administration Obama, la communauté juive américaine et Israël. Les révélations de Maariv sont survenues un jour seulement avant l'arrivée à New York de Tariq Ramadan - le controversé petit fils d'Hassan al banna, le fondateur des Frères Musulmans - pour qui la délivrance d'un visa aurait été soutenue par la Secrétaire d'Etat Clinton. Hier aussi, de nouvelles règles désapprouvant le terme de "radicalisme islamique" ont été annoncées par le secrétaire à la défense Gates.

D'après Maariv, "... les personnes qui travaillent au réacteur de Dimona et qui ont demandé un visa pour se rendre aux Etats Unis pour suivre des enseignements universitaires de physique, de chimie et d'ingéniérie nucléaire - ont tous vu leur demande refusée, en raison précisément de leur lien avec le réacteur de Dimona. Il s'agit d'une nouvelle décision politique de l'administration Obama car l'entrée pour études aux USA des personnes qui travaillent sur ce réacteur n'avait jamais posé problème, et récemment encore ils recevaient des visas et pouvaient étudier aux Etats Unis.
Les responsables militaires Israéliens indiquent que ces employés n'ont aucun dossier judiciaire aux USA et ont été pointés uniquement à cause de leur lieu de travaim.
En outre, les équipements et matériaux du réacteur de Dimona ne viennent apparemment pas des Etats Unis. Zeev Alfasi - directeur de l'ingéniérie nucléaire à l'université israélienne Ben Gourion - observe que "les Etats Unis ne vendent rien ayant un rapport avec le nucléaire pour le réacteur de Dimona, ce qui signifie absolument rien. Les détecteurs de radiations, par exemple, doivent être achetés maintenant en France parce que les USA refusent d'en vendre à Israël.

Pajamas Media a contacté le Département d'Etat au sujet de cette nouvelle politique des visas envers les scientifiques Israéliens. On nous a répondu via leur service de presse que la loi fédérale leur interdit de discuter de problèmes individuels de visa.

jeudi 8 avril 2010

Ethique du journalisme et conflit du Proche orient

Cet article issu du blog de Philip Weiss donne un aperçu concret du traitement différentiel de l'information relative au conflit palestino-sioniste. Il révèle aussi de manière éclatante ce que signifie une approche journalistique "équilibrée" des événements en Palestine occupée: cet "équilibre" ne peut se trouver qu'au détriment  de la vérité. On notera l'ironie à peine voilée de l'auteur de l'article qui observe qu'un journaliste qui s'était livré à une telle approche "équilibrée" au prix d'un travestissement éhonté des faits, n'en a pas moins été récompensé par un poste d'enseignant dans une prestigieuse université aux Etats Unis.


L'incident de 'Beita' en 1988 met en lumière une occupation cruelle et le manque de détermination des journalistes

par David Samel, 6 avril 2010, Mondoweiss (USA) traduit de l'anglais par Djazaïri

C'est aujourd'hui le douzième anniversaire d'un de ces innombrables événements tragiques de l'histoire du conflit israélo-palestinien. Il est bon de le revisiter parce qu'il est caractéristique du racisme, de la cruauté, de l'injustice et même de l'insanité de l'occupation. Une série d'articles du New York Times saisit la chronologie des événements et, tout aussi important, comment ces événements ont été révélés et discutés par les articles du journal.
L'incident s'était produit le 16 avril 1988 dans et autour du village cisjordanien de Beita. L'intifada avait commencé quelques mois plus tôt, et le bilan des tués s'élevait à 122 palestiniens tués par l'armée israélienne qui avait perdu un seul soldat. En plus des pertes palestiniennes, il y avait eu un nombre inconnu d'arrestations, de tortures routinières de prisonniers, et de membres brisés délibérément par les troupes israéliennes en vertu d'une politique délibérée du ministre de la défenses, le futur prix Nobel de la paix, Yitzhak Rabin.

Ce qui avait amené cet incident à faire la une du New York Times était le fait qu'Israël venait de perdre son premier civil, une adolescente nommée Tirza Porat. Dans un article intitulé "Une jeune fille Israélienne tuée à coups de pierres en réunion," John Kifner rapportait que Tiza avait été "lapidée à mort par des villageois palestiniens" alors qu'elle randonnait avec des amis dans le cadre d'une "sortie de vacances". Le corps de l'article révélait que deux palestiniens avaient aussi été tués, mais le titre de l'article ne laissait aucun doute quant à la vie qui avait la plus grande importance.

Les randonneurs Israéliens avaient rapporté que leur groupe de 18 personnes, dont deux étaient des gardes armés, avait été confronté près de Beita à de jeunes palestiniens qui lançaient des pierres et que le "pandemonium [apocalypse] avait éclaté... quand une femme s'était précipitée, lançant une grosse pierre à la tête d'un des gardes Israéliens." Des responsables de l'armée avaient déclaré que le "crâne [de Tirza] avait été fracassé par des coups répétés, apparemment avec des pierres." Selon le général Amram Mitzna, commandant pour la Cisjordanie, "De nombreuses pierres avaient été lancées sur les enfants qui ont aussi été battus. Suite à quoi, la jeune fille a été tuée et deux ou trois des adolescents de la randonnée ont été grièvement blessés."

Israël; qui a infligé tant de souffrances pour réprimer un soulèvement contre 21 ans d'occupation, se retrouvait alors "victime" d'une infime fraction de cette souffrance et la réaction fut immédiate et extrême. Le ministre des affaires religieuses Zevulun Hammer, faisait écho avec le point de vue supposé religieux, appelant l'armée à "couper les bras de ces sauvages et à écraser la tête de cette vipère de la mort."

Le lendemain, les obsèques de Tirza se transformèrent en spectacle public. Les autres colons appelaient à la "vengeance" et à l'expulsion des Arabes. Le premier ministre Yitzhak Shamir mit de l'huile sur le feu en disant aux participants aux funérailles, "Toute la nation est en colère" et "Dieu vengera son sang". Un rabbin ajouta que le village de Beita "devait être éliminé de la surface de la terre." Le ministre de la justice Avraham Sharir recommandait ma démolition de maisons et l'expulsion de centaines de personnes sur simple suspicion d'avoir une responsabilité.

Israël commença immédiatement l'application de ce genre de justice. Un troisième jeune Palestinien fut tué, cette fois par l'armée [sioniste], qui expliquera que le garçon tentait de fuir, probablement devant les soldats armés qui le poursuivaient en lui tirant dessus. L'armée détruisit aussi plusieurs maisons dans le village.

Pourtant, le jour même des funérailles, le récit des randonneurs avait commencé à s'effondrer avec le retrait du corps de Tirza d'une balle tirée par un garde Israélien. D'autres informations avaient pu être obtenues des randonneurs Israéliens qui affirmaient que les gardes Israéliens avaient tiré plusieurs coups de feu hors du village et répétaient que les problèmes commencèrent quand une femme atteignit avec une pierre un garde Israélien, un adepte de Meir Kahane nommé Roman Aldubi.  Aldubi avait un tel passé de violence contre les Arabes, y compris par arme à feu, qu'il devint le premier citoyen juif à être soumis aux "pouvoirs d'état d'urgence utilisés habituellement pour contrôler les Arabes," selon le New York Times. Un des randonneurs Israéliens avait confié à ABC News que la sortie avait un message politique pour la population indigène: "Nous devions leur montrer que le pays est à nous."

Le jour suivant, un article du New York Times confirmait que Tirza avait été en fait tuée par une balle perdue titée par Aldubi, le garde Israélien. Il s'avérait aussi aue la femme qui avait touché Aldubi avec une pierre était la soeur du jeune paysan dont le nom n'a pas été donné, qu'Aldubi venait d'assassiner. L'article révélait qu'Aldubi avait aussi blessé par balle dans le ventre un autre paysan. La réponse de l'armée à ces révélations fut de démolir huit maisons de plus dans le village, soit un total de 14 maisons détruites.

Selon le commandant de l'armée israélienne, Aldubi avait utilisé les jeunes randonneurs Israéliens comme boucliers humains. Il avait dit aux enfants de "former un cordon, une barrière autour de lui de sorte que personne ne puisse l'atteindre" et il avait commencé à tirer, tuant un Palestinien et en blessant un autre. Dans la mêlée qui avait suivi, certains villageois palestiniens avaient protégé les jeunes Israéliens de la foule en colère. Ils avaient désarmé les gardes Israéliens, mais au lieu de servir de ces armes eux-mêmes, ils avaient tenté de les détruire.

Le 10 avril, quatre jours après l'incident, et alors que les faits les plus importants étaient déja connus, un éditorial du New York Times exprimait une incertitude sur la question de savoir si Tirza avait été "tuée par des pierres lancées par des Palestiniens ou par une balle provenant de l'arme d'un protecteur Israélien." Son propre journaliste avait déjà confirmé cette dernière version. L'éditorial savait à qui imputer la faute: "les deux côtés en étaient responsables," même si une attention bien plus considérable avait été consacrée à l'attaque arabe.
Le jour suivant, quand la responsabilité pour l'événement était devenue assez claire, le ministre du commerce Ariel Sharon proposa l'évacuation de tout le village de Beita, "le dynamitage de toutes ses maisons et la construction de nouvelles colonies". Israël expulsa alors 12 palestiniens, dont six de Beita, vers le Liban Sud, arracha des centaines d'amandiers et d'oliviers en guise de punition collective, enseignant aux villageois de Beita à ne pas se désigner comme des victimes de la violence des colons.

Une semaine environ après l'incident, le premier ministre Shamir tint un discours dans lequel il refusait d'accepter la reconnaissance par ses propres militaires que Tirza avait été tuée par un projectile israélien et non par des jets de pierres palestiniens. "Aujourd'hui encore, alors que nous vivons dans notre propre pays, "des gens au coeur malfaisant et insensible tirent des flèches empoisonnées sur nos jeunes pendant qu'ils se promènent à la campagne, la transformant en vallée de la mort."

Quand la pression est retombée, et que la fièvre du début est revenue à la normale, les autorités israéliennes ont puni la partie coupable. Non, pas Aldubi. On estima que cet 'assassin de trois personnes avait assez souffert et il ne fut pas poursuivi en justice. Mais une peine de prison fut infligée à la soeur, enceinte, du premier Palestinien tué par Aldubi, pour l'avoir frappé à la tête avec une pierre.

Résumons donc les faits. Un groupe de colons illégaux fait une randonnée délibérément provocatrice vers un village arabe pour montrer qui est le maître. Ils permettent à une tête brûlée avec une histoire de violence d'agir comme garde armé et, c'était prévisible, il assassine deux Palestiniens, tire sur deux autres, et tue accidentellement une jeune fille Israélienne. Le New York Times impute la même part de responsabilité aux deux parties. L'armée israélienne tue un troisième jeune Palestinien parce qu'il "s'enfuit" et démolit 14 maisons, la plupart, voire toutes, après avoir appris qui était responsable de la mort de l'israélienne. Celui qui a tué trois personnes est laissé en liberté tandis que la soeur, enceinte, d'une des victimes palestiniennes va en prison et que six hommes du village sont expulsés du pays.

Non moins significatif était le fait que cet article était un article de suivi sur les turbulents villageois de Deita, rédigé par par John Brinkley et publié par le New York Times quatre mois plus tard. Dans une étrange démarche pour se conformer à la politique "équilibrée" du New York Times, Brinkley avait réduit le nombre de tués Palestiniens à un au lieu de trois. Pour faire bonne mesure, Brinkley ajoutait qu'au moment il est devenu clair que Turza avait été tuée par un autre colon et non lapidée à mort, "Israël avait déjà exercé sa vengeance, "en dynamitant 14 maisons et en expulsant six habitants au Liban.

Dès lors que les articles de son propre journal avaient rapporté de manière précise aussi bien le bilan des tués que le fait qu'Israël avait exigé vengeance même après avoir appris la vérité sur la mort de Tirza, il est diffcile de croire que les erreurs de Brinkley étaient fortuites. Il a simplement réécrit l'histoire pour la rendre plus acceptable pour sa propre sensibilité. C'est le genre de journalisme qui a amené Brinkley à exercer comme professeur à Stanford après 23 ans de carrière au New York Times.

Depuis plus de 20 ans avant cet incident, et 20 autres années depuis, c'est ce que l'occupation a signifié pour des millions de palestiniens. Ils ont dû endurer l'obscénité d'une dictature militaire imposée par une puissance étrangère avec une idéologie raciste flagrante qui les perçoit comme des sous-hommes pour avoir osé être nés sur une terre convoitée par un autre peuple. Quand ils se rebellent, même alors qu'ils sont victimes de l'hostilité israélienne, ils sont jugés coupables d'insubordination et sujets à des punitions collectives très dures.

Qui plus est, les choses ont empiré ces 22 dernières années. Elles continueront à se dégrader tant qu'un "peuple" insistera sur son droit à la domination absolue sur l'autre.

mardi 6 avril 2010

La légalité de l'Etat sioniste en question

Alan hart est un de ces vieux routiers du journalisme britannique dont on ne sait s'ils sont de droite ou de gauche tant leur parcours personnel et intellectuel semble porter une marque d'excentricité typiquement britannique.
Excentricité ne veut pas dire farfelu, terme qui ferait injure au grand professionnalisme d'un reporter au parcours peu commun. Ainsi, Hart a une très bonne connaissance des dossiers relatifs au Moyen Orient, région qu'il a couverte pour la chaîne ITN et la BBC. Sur son site web personnel, on peut le voir, alors jeune journaliste, devant le canal de Suez au moment de l'avancée sioniste pendant la guerre dite des six jours ou serrant la main du roi Fayçal d'Arabie qu'il fut le premier journaliste occidental à interviewer. Sans oublier une photo de Golda Meir, dédicacée à son intention par l'ancienne chef du gouvernement sioniste.
Toutes ces expériences et rencontres ont fait d'Alan Hart un anti sioniste convaincu si ce n'est radical.
L'article que je vous propose ici n'apporte guère d'éléments nouveaux, mais j'ai trouvé qu'il synthétisait bien le problème de légitimité, de légalité auquel est confrontée l'entité sioniste.
Cette question est en effet aussi fondamentale que celle des rapports de force, militaires ou politiques, car elle en est en partie indépendante. Car la base légale de l'entité sioniste est inexistante pour les raisons qui sont exposées ci-après. Et la situation restera en l'état tant que les Palestiniens n'auront pas non seulement reconnu l'Etat sioniste mais aussi son caractère juif. Comme le dit Alan Hart, sans ce préalable de reconnaissance par les palestiniens, il n'y a aucune chance que le régime sioniste accepte de négocier pour autre chose que la suppression de tel ou tel checkpoint.
Le problème qui se pose aux sionistes, c'est que cette reconnaissance ne peut leur être accordée que de deux manières: soit par un référendum auprès de la population palestinienne, soit par un Etat palestinien. Or cet Etat est précisément ce dont les sionistes ne veulent pas ou que même les moins ultras d'entre eux ne peuvent plus vouloir du fait de la réalité de la colonisation des territoires occupés en 1967. Et, de toutes façons, aucun dirigeant palestinien ne sera assez fou pour reconnaître le caractère juif de l'Etat voyou.


Un oxymore au Moyen Orient
Alan Hart, Khaleej Times (EAU) 6 avril 2010 traduit de l'anglais par Djazaïri

Pour les lecteurs qui ne seraient pas très familiers avec la terminologie anglaise, un oxymore est une figure de rhétorique qui combine des termes contradictoires pour former une expression comme la gentillesse cruelle ou faussement vrai (ce mot dérive du grec oxymoros qui signifie fin sous une apparence de niaiserie).

Dans le cadre de ce débat sur la légitimité d'Israël, je vais me limiter à une question et une réponse.

La question est: comment pouvez-vous délégitimer quelque chose (en l'espèce l'Etat sioniste) alors qu'elle n'est pas légitime?

Mettons de côté le conte à dormir debout de la promesse divine (qui même si elle était vraie n'aurait aucune incidence sur la question parce que les Juifs qui sont "rentrés" en réponse à l'appel du sionisme n'avaient aucun lien biologique avec les anciens Hébreux), la prétention à la légitimité de l'Etat sioniste repose sur la Déclaration balfour de 1917 et la résolution portant de l'Assemblée Générale de l'ONU de 1947 sur le plan de partition.

Le seul intérêt réel de la Déclaration Balfour est le fait qu'elle était une expresion à la fois de la volonté du gouvernement britannique d'instrumentaliser les Juifs à des fins impériales et de la volonté des Juifs sionistes d'être utilisés. La vérité est que la Grande Bretagne n'avait absolument aucun droit de promettre aux sionistes un territoire en Palestine qui n'était pas possession britannique (à l'époque, la Palestine était contrôlée et effectivement rattachée à l'Empire Ottoman).

La Déclaration Balfour a permis aux sionistes de dire que leur revendication sur la Palestine avait été reconnue par une grande puissance et d'affirmer ensuite que l'entreprise sioniste était donc légitime. Mais la légitimité que la Grande Bretagne a attribuée implicitement était complètement fallacieuse, ce qui signifie inauthentique, mensongère, une imposture.

L'assertion par les sionistes qu'Israël a reçu son acte de naissance et donc sa légitimité de la résolution de partition adoptée par l'Assemblée Générale des Nations Unies du 29 novembre 1947 relève de la pure propagande et du non sens ainsi que le démontre un examen honnête des faits tels qu'ils se sont passés.

En premier lieu, sans le consentement de la majorité des habitants de la Palestine, l'ONU n'avait pas le droit de décider la pértition de la Palestine ou d'assigner une partie de son territoire à une minorité d'immigrants étrangers afin qu'ils y établissent leur propre Etat.

Malgré cela, par la plus faible des marges, et après un vote truqué, l'Assemblée générale de l'ONU a adopté une résolution de partition de la Palestine pour créer deux Etats, un arabe et un juif, Jérusalem ne faisant partie d'aucun des deux. Mais la résolution de l'Assemblée Générale n'était qu'une proposition non contraignante - ce qui veut dire qu'elle ne pouvait pas avoir d'effet, ne pouvait devenir contraignante qu'à condition d'être approuvée par le Conseil de Sécurité.

La vérité est que la proposition de partition de l'Assemblée Générale n'a jamais été soumise à l'examen du Conseil de Sécurité. Pourquoi? Parce que les Etats Unis savaient, en cas d'approbation, qu'en raison de l'opposition des Arabes et des autres Musulmans, elle ne pouvait être mise en application que par la force; et le président Truman n'était pas prêt à recourir à la force pour partager la Palestine.
Le plan de partition souffrait donc d'un vice de forme (qui le rendait non valide) et la question de quoi diable faire de la Palestine - après le gâchis causé par les britanniques puis leur départ) - était ramenée devant l'Assemblé Générale pour de nouvelles discussions.
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L'option en faveur, et proposée par les Etats Unis, était une tutelle temporaire par l'ONU. C'est alors que l'Assemblée Générale débattait de ce qu'il convenait de faire qu'Israël a déclaré unilatéralement son indépendance - au mépris même de la communauté internationale organisée, dont l'administration Truman.

La vérité à l'époque était qu'Israël, qui est née principalement comme conséquence du terrorisme sioniste et du nettoyage ethnique planifié, n'avait pas droit à l'existence et, pour être plus précis; ne pouvait avoir le droit à l'existence sauf si... Sauf si elle était reconnue et légitimée par ceux qui ont été dépossédés de leur terre et de leurs droits avec la création de l'Etat sioniste. Selon le droit international, seuls les palestiniens pouvaient donner à Israël la légitimité qu'elle convoitait.

Comme me l'avait exposé il y a de nombreuses années Khalad al-hassan, un important intellectuel du Fatah, cette légitimité était "la seule chose que les sionistes ne pouvaient pas nous prendre par la force."

La vérité historique telle que résumée brièvement ci-dessus explique pourquoi le sionisme a toujours insisté sur la condition préalable absolue pour des négociations ayant la plus petite chance d'aboutir (une mesure de justice acceptable pour les Palestiniens et la paix pour tous) qui consiste à reconnaître le droit d'Israël à l'existence. Un droit qu'elle sait ne pas avoir et n'aura jamais sauf si les palestiniens le lui accordent.

On peut dire sans crainte d'être contredit (sauf par des sionistes) que ce qui délégitime Israël, c'est la vérité historique.

Et c'est pourquoi le sionisme a travaillé si dur, avec moins de réussite que par le passé et donc de façon de plus en plus désespérée, d'éliminer la vérité.

Alan Hart est un journaliste Britannique, (ancien correspondant d'ITN au Moyen Orient, ancien présentateur de l'émission Panorama sur la BBC) écrivain et biographe de Yasser Arafat. Son dernier livre, Le sionisme: le véritable ennemi des Juifs, est une épopée en trois volumes.