mercredi 13 décembre 2006

USA Today, France tomorrow?


L'article nous dépeint les difficultés auxquelles sont confrontés les Arabo-Américains aux USA pour peu qu'ils soient musulmans. Difficultés qui n'en seraient qu'à leur début semblent penser un certain nombre d'entre eux qui évoquent d'éventuels camps de concentration tels que ceux où furent parqués les Nippo-Américains pendant la seconde guerre mondiale.
Apparemment l'auteur n'est pas très optimiste car, au delà des sondages peu encourageants qui illustrent son propos, le passage sur la foi dans les valeurs démocratiques des USA est plutôt bref et l'article se termine par la citation d'un responsable de l'administration Bush qui constate sans en avoir l'air désolé que droits civiques et lutte contre le terrorisme ne sont pas faciles à concilier et qui exhorte les Musulmans US à aider dans la lutte contre le terorisme.
Voilà qui rappelle un élu français (une élue je crois) qui sommait non pas les Musulmans mais les imams de faire diminuer la délinquance.
Si à cette époque là, la France avait une longueur d'avance sur les USA, ces derniers semblent montrer la voie qu'un certain Nicolas donne toute apparence de vouloir emprunter.
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La peur « aussi forte qu'après le 11 septembre»
par Rick Hampson USA TODAY 13 décembre 2006, traduit de l'anglais par Djazaïri
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Les Arabes Musulmans venus à Détroit il y a 80 ans pour travailler dans la nouvelle usine d'henry Ford pensaient que leur rêve américain n'aurait pas de limites. Mais après cinq années passées sur le front intérieur de la guerre américaine contre le terrorisme, beaucoup de leurs descendants font profil bas, se cachent et évitent de se déplacer.
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Dans cette enclave comme dans d'autres du même type au New-Jersey ou à Brooklyn, de nombreux Arabes musulmans disent que leur communauté se replie sur elle-même – s'isolant d'une société qui tend de plus en plus à identifier l'Islam au terrorisme.« La situation est aussi mauvaise qu'après le 11 septembre » explique Rana Abbas-Chami du Michigan American Arab Anti-Discrimination Committee. « De nombreuses personnes ont peur et ont modifié leur façon de faire. » Certains évitent de se déplacer. Ils répugnent à prendre l'avion, à traverser la frontière avec le Canada ou aller dans les centres commerciaux extérieurs à la ville. « On a le sentiment que si vous vous éloignez trop de Dearborn, tout peut arriver. » dit osama Siblani, éditeur d'un journal local. Certains se fondent dans la masse. Ils anglicisent leurs nom (l'électricien Osama Nimer est maintenant Samuel nimer) ou en changent complètement (l'infirmier Mohammed Bazzi s'appelle maintenant Alex Goldsmith). Ils taillent leurs barbes. En public ils parlent anglais plutôt qu'arabe. Ils arborent le drapeau national. Ils portent la casquette du club des Tigers.
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Certains font profil bas. Ils évitent de donner à des oeuvres caritatives musulmanes, en tous cas pas par chèque, et surtout pas si elle rayonne à l'étranger. Ils y réfléchissent à deux fois avant de louer une camionnette, de demander le permis de chasse ou de prendre une leçon de pilotage.
Certains considèrent Dearborn, foyer de la plus importante communauté arabo-musulmane des USA, comme un havre de sécurité tandis que d'autres la voient comme une nasse potentielle.Après l'attaque japonaise contre Pearl Harbour en 1941, la crainte de sabotages sur le territoire national avait conduit à l'internement des citoyens Nippo-Américains. Certains Arabes musulmans se demandent si cela ne pourrait pas se reproduire – notamment si devaient se produire de nouveaux attentats sur le sol des USA. Les gens d'ici spéculent sur les espions et les informateurs cachés parmi eux, les écoutes et la surveillance gouvernementales et, en cas de nouveau 11 septembre, sur les camps de concentration.
Ces sujets sont revenus de manière répétée dans les entretiens menés par USA Today avec un peu plus d'une vingtaine d'Arabes musulmans à travers le pays.Après les attentats terroristes de 2001 – l'oeuvre de 19 Arabes Musulmans qui avaient circulé à travers le territoire -les Arabo-Musulmans vivant ici avaient espéré que les choses reviendraient progressivement à la normale. Puis sont arrivées les guerres désasteuses et prolongées en Afghanistan et en Irak; les iniatives sécuritaires post 11 septembre comme le Patriot Act, les attentats d'Al Qaida contre la gare de Madrid et le métro de Londres, la guerre entre Israël et le Hezbollah au Liban.
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Selon Michael Suleiman, politologue à l'Université d'Etat du Kansas, la discrimination envers les Arabo-Musulmans est pratiquement inévitable à cause d'un gouvernement décidé à éviter un nouveau 11 septembre, d'une opinion publique soumise au tir de barrage des images de violence en Irak et des dénociations de ce que le président Bush appelle le « fascisme islamique. »Aujourd'hui, les Arabo-Musulmans – même ceux qui n'ont jamais été interrogés par le FBI, jamais été harcelés par leur chef ni insultés au passage d'une voiture – se sentent plus vulnérables que jamais.« Chaque crise rend les choses plus difficiles. Ils sont toujours dans l'inquiétude, » explique Suleiman. « Ils se damandent 'Quand deviendrons nous vraiment des Américains? Quand donc le trait d'union [de Arab-American] disparaîtra-t-il? »Les incidents anti-musulmans répertoriés ont augmenté de 30 % l'an dernier aux USA selon le Council on American-Islamic Relations Council on American-Islamic Relations (CAIR) qui accuse une atmosphère « négative et orientée politiquement » sur internet et à la radio. Les 1972 plaintes pour harcèlement, violences et discrimination représentent le niveau le plus élevé depuis que CAIR a commencé à enregistrer ce genre d'incidents en 1995. Les Américains semblent peu compatissants. 39 % d'entre eux disent avoir au moins quelques préjugés contre les Musulmans selon une enquête USA TODAY/Gallup réalisée cette année. La même proportion soutient qu'on impose aux Musulmans US – étrangers ou non – la possession d'une carte d'identité spéciale. 1/3 pensent que les Musulmans US ont de la sympathie pour Al Qaida.
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Les responsables politiques se sont fait les portes paroles de ces inquiétudes. Cet automne, dans une lettre distribuée par courrier, l'élu Républicain Peter King de Long Island – considéré habituellement comme un modéré – a accusé les Musulmans Américains de ne pas dénoncer suffisamment les attentats du 11 septembre. Par le passé, il a déclaré que 85 % des mosquées avaient un « encadrement extrémiste. »
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Chacun a une histoire à raconter
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Dans la zone à forte densité arabe d'East Dearborn, de l'immigré récent au membre de la quatrième génération d'Américains qui n'est jamais allé au Proche-orient, pratiquement tout le monde a une histoire à raconter ou connait quelqu'un dans ce cas.
Des histoires comme celle de Farooq Al-Fatlawi, passager dans un bus en route pour Chicago, expulsé du bus avec ses bagages à Toledo après avoir dit au chauffeur qu'il était originaire d'Irak. Cette année, d'autres affaires ont eu un retentissement national :
Raed Jarrar, militant des droits civiques à Bay Area s'était vu interdire l'embarquement dans un avion pour avoir porté un T-shirt sur lequel était écrit « Nous ne nous tairons pas » en arabe et en anglais.
Six imams aperçus en prière au terminal de l'aéroport de minneapolis s'étaient faits ensuite débarquer de l'avion après qu'un passager ait transmis une note à l'hôtesse de l'air selon laquelle ces hommes s'étaient comportés de manière suspecte à bord.Les imams, menottés interrogés puis relâchés, ont nié les accusations; cinq d'entre eux tentent de régler à l'amiable le contentieux avec US Airways. La compagnie a déclaré que l'équipage avait agi de manière appropriée en faisant évacuer les imams de l'avion.
Keith Ellison, premier Musulman à être élu au Congrès, a été calomnié pour avoir prévu de prêter serment sur un Coran lors de la cérémonie de prise de fonctions.
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Les Arabo-Musulmans interviewés par USA TODAY estiment que les autres Américains doivent comprendre qu'ils prient cinq fois par jour, au travail ou sur la route s'il le faut; qu'ils doivent l 'aumône aux nécessiteux et ont du mal à le faire quand le gouvernement fait fermer les oeuvres caritatives islamiques; les foulards que portent les femmes et les barbes des hommes sont des signes d'observance religieuse et non de méfiance envers les coutumes américaines. Et puis ceci : personne n'a plus à perdre avec une nouvelle attaque terroriste que les Arabes Musulmans.
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Ce qui intimide certains en galvanise d'autres – les incite à voter, à s'exprimer et à revendiquer les libertés américaines exaltées par Franklin Roosevelt et Norman Rockwell. Le résultat est une identité collective clivée explique Imad Hamad de l'Anti-Discrimination Commitee : « Nous sommes dans le brouillard. »
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Daniel Sutherland, chef de la Division des Droits Civiques au Département de la Sécurité Intérieure (Homeland Security) comprend les récriminations des Musulmans Arabes. Pour lui, combattre le terrorisme en respectant les droits civiques est « un challenge difficile. »
Mais Sutherland explique que le gouvernement a besoin de l'aide des Arabes Musulmans Américains pour combattre le terrorisme au niveau national : « La sécurité de la patrie ne sera pas assurée par des personnes qui restent assises dans leur bureau. »

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