lundi 15 avril 2013

Lincoln: ce que Steven Spielberg a omis dans son film


Je vous propose une critique du film Lincoln réalisé par Steven Spielberg d’un genre que vous aurez rarement l’occasion de lire ou d’entendre dans les médias grand public même si André Kaspi va assez loin sur le volet historique.
Image
Regardez donc avec vos deux yeux M. Spielberg!
Le texte en est tiré du site internet de The Nation of Islam (NOI) de Louis Farrakhan, une organisation souvent présentée comme antisémite.
Pourtant, l’article rédigé par un «groupe de recherche » de The Nation of Islam ne se réfère qu’à des faits aisément vérifiables, notamment si on a accès à des sources universitaires.
Image
Siège national de la Nation Of Islam à Chicago
Sans aller jusqu’à aller dans une BIU où il me faudrait de toute façon faire fonctionner les systèmes de consultation et de prêt interuniversitaires, on peut quand même corroborer les assertions de l’équipe de la NOI.
On trouve par exemple dans le Washington Post un article d’un certain A. James Rudin qui traite de l’ordre d’expulsion des Juifs donné par le général Ulysses Simpson Grant.
Image
Ulysses S. Grant
Le fait est que les Juifs des Etats confédérés étaient farouchement attachés à l’esclavage d’autant que leur prospérité dépendait largement de l’économie de plantation. Et, comme l’écrit Robert N. Rosen, « le vieux Sud était remarquablement libre de préjugés contre les Juifs.»
On peut dire que la chose était normale dans la mesure où la qualité de sous-humains des esclaves faisait l’unanimité.
Un phénomène qui n’avait pas échappé au journaliste Israel Joseph Benjamin (cité par Robert N. Rosen) qui écrivait en 1859 :
Les Etats du Sud, cependant, pour des raisons naturelles, surpassaient par bien des aspects les Etats du nord en matière d’hospitalité. Les habitants blancs se ressentaient comme unis et plus proches des autres blancs – par opposition aux noirs. Dans la mesure où l’Israélite là-bas ne faisait pas le genre de travaux ingrats qu’effectuait le Noirs, il était rapidement admis dans la haute société et accédait facilement à des fonctions politiques élevées. Pour cette raison, jusqu’à présent, c’était seulement le Sud qui envoyait des Juifs au Sénat. 
C’était, on l’a compris, une affaire avant tout de classe puisque les Irlandais étaient dans le même temps généralement mal vus.
Jacques Attali parle du rôle important de Mayer Lehman dans le financement de l’armée confédérée, mais comme l’indique l’article Mayer Lehman n’était pas seulement un courtier en coton, c’était aussi un politique qui eut pour mission pendant la guerre de sécession de s’occuper de ce qui concernait les prisonniers sudistes aux mains de l’Union.
 Judah P. Benjamin, cité dans l’article, avait effectivement assumé de très hautes fonctions dans le gouvernement confédéré: ministre de la justice, ministre de la guerre et Secrétaire d’Etat.
Image
                 Judah P. Benjamin
Le nom de Judah P. Benjamin est évoqué par l’écrivain Stephen Vincent Benét dans son poème John Brown’s Body (au sujet de John Brown, voir ici) qui lui valut le prix Pulitzer en 1929 :
Judah P. Benjamin, le Juif élégant,
Barbe fine, les yeux noirs, avocat et épicurien,
Capable, le bien haï, le visage plein de vie,
Balaya d’un regard négligent la salle du Conseil avec le petit
Sourire perpétuel qu'il arborait toujours
Sans cesse comme une façade de soie côtelée.
Derrière la façade, son esprit vif, fluide et subtil
Soupesait les Gentils dans une antique balance.

Quant à Emile Erlanger (ou d’Erlanger), non content d’avoir participé au financement des Confédérés, il a aussi été à l’origine de l’arnaque qui a ruiné le beylicat de Tunis, précipitant la mise sous tutelle de la Tunisie par la France ! (l’Algérie avait auparavant été victime  des agissements d’autres banquiers…).
On peut certes reprocher à la NOI d’omettre le fait que les Juifs qui étaient beaucoup plus nombreux dans les Etats de l’Union que dans la Confédération, professaient des opinions divergentes sur l’esclavage et que certains d’entre eux (cf ce qu’en dit notamment Jacques Attali) s’étaient activement employés à soutenir l’effort de guerre contre les Etats du Sud.

Le Lincoln de Spielberg: beaucoup de noirs, mais pourquoi aucun juif?

Par NOI Research Group, NOI (USA) 29 novembre 2012 traduit de l'anglais par Djazaïri
Dans son film Lincoln, le cinéaste Spielberg présente une période décisive de l’holocauste des noirs (Black Holocaust] de la manière dont il pense que les noirs devraient la comprendre. Spielberg, qui est juif, a soigneusement filmé archivé les récits des survivants de l’holocauste juif pour sa Shoah Foundation afin de préserver le souvenir exact de leurs expériences. Mais alors pourquoi Spielberg est-il si complètement sénile dans sa représentation d’une époque si importante pour les noirs américains ? Pourquoi par exemple se sent-il le droit de promouvoir un conte de fée en guise d’histoire de la Guerre Civile et de l’esclavage des noirs, mais ignore étrangement le rôle essentiel joué par ses propres coreligionnaires dans la guerre de sécession, une guerre au cours de laquelle les juifs ont joué un rôle extrêmement important et fondamental ? 
Ce n’est pas un simple oubli. Spielberg fait appel à des chercheurs et à des historiens de haut niveau pour garantir la conformité [aux faits] de ses productions et s’assurer que sa race est représentée avec dignité et respect. Lincoln, le film, parle de la promulgation du 13ème amendement, un décret constitutionnel qui devait marquer la «fin de l’esclavage.» Mais exactement comme la partie de la Déclaration d’Indépendance précisant que «Tous les hommes sont créés égaux,» le malheureux 13ème amendement fut tout simplement ignoré. – et l’esclavage continua sans relâche sous d’autres formes. Quand les hostilités cessèrent, les deux camps se réconcilièrent et s’entendirent bientôt pour organiser un système économique beaucoup plus efficace que l’esclavage – à savoir le métayage, la servitude pour dettes et les travaux forcés. Quelqu’un devait bien planter, cultiver et cueillir le coton, le maïs, le blé et la canne à sucre, construire les voies ferrées et les ponts, et charger et décharger les bateaux qui alimentent le commerce international.
Spielberg veut conforter la fiction selon laquelle un document seul a suffi à exonérer l’Amérique [de son crime] et a mis fin pour toujours à un système grâce auquel son peuple a pu devenir si riche. Prenons comme exemple le Hollywood de Spielberg. Il est qualifié de juif par l’universitaire juif Neal Gabler, «un empire qui leur appartient» en référence aux magnats juifs qui dirigeaient tous les grands studios [NdT : L’Express titrait «Hollywood, c’est un idéal d’Européens !»  en omettant de préciser de «juifs européens» comme l’explique pourtant son article en long et en large]. Hollywood est le produit des investissements effectués par la tristement célèbre compagnie bancaire Lehman Brothers. Dans les années 1850, l’immigrant Mayer Lehman fut désigné par le gouverneur pour gérer TOUT le coton en Alabama – ce qui voulait dire qu’il avait la charge de tous les esclaves noirs africains. Sa famille avait fait tellement d’argent avec le travail servile qu’elle s’était opposée farouchement aux tentatives de Lincoln pour mettre un terme à l’esclavage des noirs. Avec leurs profits tirés du négoce du coton, ils partirent s’installer à New York et se lancèrent dans la banque pour finalement financer les «empires» du cinéma de Spielberg et des ancêtres.
Retour au film: Le Lincoln de Spielberg s’ouvre sur une scène brutale de combat au corps à corps dans les dernières phases de la Guerre Civile. Mais sans l’apport financier d’un banquier juif nommé Emile Erlanger cette ultime partie de la Guerre Civile n’aurait jamais eu lieu. En mars 1863 (3 mois après la proclamation d’Emancipation), Erlanger avait prêté 7 millions de dollars à la Confédération (environ 125 millions de dollars en monnaie actuelle) sans lesquels le Sud n’aurait pas pu payer, nourrir ou habiller ses soldats, ni acheter ses navires de guerre, ses armes et ses munitions. Elle aurait dû capituler. Erlanger espérait obtenir du Sud du coton à bas prix si les rebelles réussissaient à maintenir l’esclavage. On peut affirmer sans risque de se tromper qu’une bonne moitié des 700 000 soldats tués auraient pu être épargnés si la Confédération n’avait pas eu des fonds pour continuer la guerre. Peu importe si de nombreux africains n’auraient plus été importés comme esclaves si cette période sanglante avait été abrégée. Spielgerg a ignoré ces malheureux détails. 
Mais il y a plus : Erlanger avait réalisé la transaction par l’intermédiaire d’un avocat juif propriétaire d’esclaves en Louisiane nommé Judah P. Benjamin qui cumulait les postes de vice président et de ministre de la guerre de la Confédération ! Il avait la réputation d’être le «cerveau de la Confédération.» Sa notoriété auprès des propriétaires d’esclaves était telle que son portrait figurait sur leur monnaie ! Benjamin n’a apparemment pas passé le cap de l’audition chez Spielberg puisqu’il n’est pas dans le film. Benjamin a fui l’Amérique en emportant de nombreuses balles de coton avec lui pour financer sa vie à l’étranger. Après la guerre, il s’est servi des profits engrangés gra^ce au coton cueilli par les esclaves pour investir dans une nouvelle start-up – une organisation terroriste connue sous le nom de Ku Klux Klan !
Et il y a plus: le sénateur de Floride David Yuleee n’a pas passé le stade de l’audition non plus. Il était le premier sénateur juif de l’histoire des Etats Unis – et un fervent partisan de l’esclavage ainsi qu’un promoteur agressif de «l’éradication» des Indiens. En 1861, Yulee prononça le premiers discours au Sénat pour annoncer la sécession d’un Etat du sud.
D’autres notables manquent dans le film comme August Belmont, un banquier juif de New York qui était le président du parti Démocrate [esclavagiste à l’époque, NdT]. Il fut le directeur de campagne de Stephen A. Douglas, l’opposant pro esclavagiste de Lincoln pendant sa dernière campagne présidentielle. Belmont décriait l’abolitionnisme, dénonçant ce qu’il appelait la «politique fatale [de Lincoln] de confiscation et d’émancipation forcée.» Une autre personnalité juive américaine importante était le religieux le mieux payé d’Amérique, le rabbin newyorkais Morris Raphall qui aidait et tranquillisait les propriétaires d’esclaves en déclarant publiquement que Dieu lui-même soutenait l’esclavage. Lorsque le rabbin David Einhorn avait dit que les noirs devraient être mieux traités, il avait été expulsé en pleine nuit de sa synagogue de Baltimore – par sa propre congrégation juive ! 
Et puis il y avait ces marchands juifs qui importaient clandestinement le précieux coton du sud alors même que Lincoln avait ordonné le blocus. Ce commerce illégal donnait au Sud l’argent dont il avait besoin pour combattre les troupes de l’Union. Ils étaient si nombreux à causer tant de dommages à la cause de l’Union que le général Ulysses S. Grant avait essayé d’expulser tous les Juifs de la région ! Ces contrebandiers Juifs qui soutenaient l’esclavage  n’ont pas trouvé non plus leur place dans le film de Spielberg.
Spielberg veut nous faire croire que les noirs étaient le principal problème du président Lincoln, mais Lincoln avait beaucoup de soucis avec les Juifs de son époque. Un officiel appartenant à l’administration Lincoln considérait effectivement la principale organisation juive, le B’nai Brith comme une «organisation déloyale» qui «aidait les traitres.»
Quand Salomon de Rothschild, un membre de la plus grande famille de banquiers dans le monde, vint en Amérique, il déclara que s’il était Américain, il serait «un partisan résolu de l’esclavage [Staunch Slavery Man],» et il exhorta sa famille à aider la Confédération. Et si Spielberg présente Lincoln en bon grand-père qui raconte des histoires dans style d’Esope, Rothschild n’était pas d’accord et le dénonçait comme ayant «l’apparence d’un rustre juste capable de raconter des histoires pour les salons mondains.»
Les femmes juives manifestaient le même mépris à l’égard du président, ainsi que l’a observé le professeur Albert Mordell : elles «étaient plus virulentes dans leur haine de Lincoln et plus fanatiques dans leur parti pris pour la Confédération que les hommes.» En fait, les Juifs étaient si fanatiques qu’un autre universitaire juif demandait ému, «Quel phénomène sociologique a pu amener les Juifs du Sud à lutter avec tant d’ardeur pour le principe de l’esclavage ? Pourquoi était-il prêt à sacrifier sans difficulté sa vie pour une cause qu’il savait contraire aux principes de la religion ?... Ici, dans le Sud, les Juifs ont combattu volontairement et avec joie.»
 On ne trouvera pas la réponse à cette question dans le film de Spielberg mais dans l’Encyclopédie Juive : «Les plantations de coton en beaucoup d’endroits du Sud étaient entièrement entre les mains de Juifs et, en conséquence, l’esclavage avait des partisans parmi eux.» Dans son livre «Fate of the Jews [le destin des Juifs], Roberta Feurlicht conclut avec franchise : «Non seulement il y avait un nombre disproportion de Juifs propriétaires d’esclaves, négociants en esclaves et préposés à la vente aux enchères d’esclaves, mais quand on traçait une ligne de séparation entre les races, ils étaient du côté blanc.»
On peut donc comprendre pourquoi le film de Steven Spielberg sur la fin supposée de l’esclavage des noirs devait être tourné dans personnages juifs. L’image soigneusement conçue mais totalement fausse des Juifs venus à l’aide des noirs aurait été remise en cause pour toujours. Leur non participation  aux efforts de Lincoln pour aboutir à l’émancipation des noirs est probablement le seul fait historique exact de ce film.
Et comme le film de Spielberg de 2012 doit encore décrire les noirs seulement en tant que domestiques, bonnes, majordomes, cochers et concubines, peut-être que les noirs devraient y réfléchir et s’intéresser à la plus profonde déclaration de Lincoln. Il a dit : «L’aspiration des hommes est de jouir de l’égalité avec les meilleurs quand ils sont libres, mais sur ce vaste continent pas un seul homme de votre race n’est à l’égal d’un seul homme de la nôtre… Il vaut donc mieux pour nous tous d’être séparés.»
Voilà qui ferait un grand film.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Commentaires publiés après modération. Les propos injurieux, diffamatoires ou à caractère raciste ne seront pas publiés.