Le président égyptien Mohamed Morsi vient d’être renversé par un coup d’état militaire avec, dit-on, le soutien populaire.
Il est certes vrai que les rues des villes égyptiennes sont depuis plusieurs jours le lieu de manifestations imposantes pour exiger le départ de M. Morsi, l’armée ayant été publiquement appelée à intervenir par les manifestants.
Il y a là bien sûr des manipulations évidentes de la part de ceux qui, dans l’armée, souhaitaient mettre un terme au mandat présidentiel.
Il y a aussi une insatisfaction évidente de larges couches de la société mécontentes de la situation sociale et économique, mais aussi des penchants sectaires du gouvernement des Frères Musulmans. Parmi ces mécontents, il faut évidemment compter la masse des Coptes, ces chrétiens autochtones qui tendent à se sentir mis à l’écart de la vie publique et visés par des discours d’exclusion. Les affirmations de la fraternité islamo-chrétienne ou tout simplement égyptienne ont de fait été nombreuses ces derniers jours.
Il faut cependant reconnaître que le gouvernement de Mohamed Morsi n’est en rien l’initiateur de cette approche de cette minorité religieuse. Sur ce point comme sur d’autres, le gouvernement des Frères Musulmans est dans la continuité du régime précédent.
Cette continuité s’observe par exemple dans son attitude vis-à-vis de la bande de Gaza. En effet, alors que tout le monde s’attendait, y compris une bonne partie de son électorat, à ce que l’Egypte cesse de collaborer avec le régime sioniste au siège de Gaza, il n’en a rien été. Au contraire, puisque les autorités égyptiennes ont déployé un zèle sans précédent pour neutraliser les fameux tunnels qui relient Gaza à l’Egypte et servent à acheminer toutes sortes de marchandises.
De la même manière, le gouvernement de la confrérie a accepté de respecter les accords de paix qui lient l’Egypte à l’entité sioniste, une condition sine qua non pour que l’armée égyptienne continue à recevoir l’importante aide financière des Etats Unis.
Cette continuité du pouvoir des Frères Musulmans avec l’ancien régime se repère même dans les convulsions qui ont finalement abouti à la destitution de Mohamed Morsi.
Cette continuité est parfaitement explicitée dans l’article que je vous propose.
On observera quand même que, à la différence de Hosni Moubarak, Mohamed Morsi tirait son pouvoir d’élections qu’il a remportées régulièrement. Même si cette élection s’inscrivait dans une démarche des USA et de l’armée égyptienne visant à mettre fin à un processus révolutionnaire qui aurait pu réserver bien des surprises.
C’est ce processus révolutionnaire qui a repris ces jours-ci et que l’armée a enfourché pour profiter d’une opportunité de se débarrasser d’un Mohamed Morsi qui n’a décidément pas su tenir la baraque.
par Dan Murphy, The Christian Science Monitor (USA) 3 juillet 2013 traduit de l’anglais par Djazaïri
Au milieu de manifestations sans précédent qui ont commencé depuis trois jours, le président égyptien Hosni Moubarak a prononcé un discours provocateur qui accusait des mains de l’étranger qui cherchent à semer le chaos dans le pays et à saper ce qu'il considère être sa propre légitimité en tant que leader.
Cet appel en forme de fin de non recevoir avait exaspéré les manifestants et avait, on le comprend avec le recul, ruiné le mince espoir qu’il avait à cette étape de se maintenir au pouvoir. Comme la contestation s’accentuait, les Etats Unis avaient pris lentement leurs distances avec M. Moubarak. Le 27 janvier, le vice président Joe Biden soulignait que Moubarak n’était pas un dictateur et qu’il devait rester au pouvoir. Deux jours avant, le 25 janvier, la Secrétaire d’Etat Hillary Clinton déclarait que l’Egypte et son gouvernement étaient «stables.»
Mais après le discours de Moubarak, les Etats-Unis adoptèrent un ton nouveau. PJ Crowley , le porte parole du Département d'Etat à l’époque, écrivait sur Twitter le lendemain : «Le gouvernement égyptien ne peut pas se contenter de reprendre les cartes puis rester sur son quant-à-soi. Les paroles par lesquelles le président Moubarak s'engage à réformer doivent être suivie par des actes."
Le 30 janvier, Mme Clinton déclarait:
"Nous avons dit très clairement que les mesures concrètes de réforme démocratique et économique que le président Moubarak a évoquées dans son discours doivent être mises en oeuvre ... il faut qu’un engagement soit pris par quiconque est au pouvoir de lancer dans un dialogue national avec le peuple d'Egypte, dans le but de prendre des mesures qui répondent aux revendications légitimes du peuple égyptien pour une plus grande participation ... c'est un moment très grave pour l'Egypte, et nous allons faire tout ce que nous pouvons pour soutenir une transition ordonnée. "
Puis, le 10 février, Moubarak a prononcé un autre discours provocateur, exaspérant à nouveau les manifestants. Les États-Unis se plaignirent que Moubarak n'avait pas fait de démarches concrètes de «réformes». Le 11 février, il démissionnait.
Hier, le président égyptien Mohamed Morsi a prononcé un discours dans lequel il a rejeté la masse de manifestants comme étant manipulée par des mains étrangères qui cherchent à semer le chaos en Egypte, et il a fait référence à plusieurs reprises à ce qu'il considère comme étant sa légitimité en tant que leader de l'Egypte. Ses propos ont provoqué la fureur manifestants, qui continuent à être très nombreux à battre le pavé au Caire et dans d'autres villes.
Aujourd'hui, la porte-parole du département d'Etat Jen Psaki a dit:
«Nous pensons qu'il y avait une absence de mesures spécifiques significatives dans la déclaration de Morsi. Il doit faire plus pour être vraiment réceptif aux préoccupations du peuple égyptien .... Nous sommes au côté du peuple égyptien. Nous avons été en contact avec toutes les parties -.avec l'opposition, avec le gouvernement, avec l'armée -. et nous allons continuer à l’être. Mais pour apaiser les inquiétudes ou éviter les suppositions, nous ne sommes pas [parties prenantes] - nous n'avons pas pris parti. [Washington s'est abstenu de critiquer l'armée égyptienne après la destitution de M. Morsi, NdT]
Cela vous rappelle quelque chose?
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