vendredi 18 mars 2011

Nouvelle donne en perspective au Proche Orient


Cette nouvelle donne passera peut-être par le cadavre de Mouammar Kadhafi.

Ceci dit, il est tout bonnement incroyable  de voir comment les choses évoluent vite, où alors de manière souterraine de sorte que leur résultat nous surprend. Je vous parlais dans mon dernier post, de cette situation incongrue qui voyait Barack Obama, Nicolas Sarkozy et David Cameron faire alliance avec le Hezbollah pour l’adoption d’une résolution de l’ONU tournée contre le régime du colonel Kadhafi.

Une incongruité qui génère par ailleurs de l’inquiétude dans l’entité sioniste où on comprend parfaitement que les Etats Unis commencent à s’apercevoir que leur soutien aux cinglés de Tel Aviv (quel autre mot pour qualifier des gens qui revendiquent une terre en vertu d’une promesse divine ?) est plus un fardeau qu’un atout.

Le handicap que constitue ce fardeau sioniste avait déjà été constaté par les services de renseignements des Etats Unis quand ils avaient fourni leur estimation du danger nucléaire posé par le régime iranien. Leur estimation avait été vivement contestée par les personnes et organisations spécialisées dans la défense du sionisme aux Etats Unis.

Les mêmes services de renseignements sont en passe de laisser entendre qu’il serait dans l’intérêt des Etats Unis de discuter  avec les Talibans, que les Etats Unis affrontent directement en Afghanistan, et avec le Hezbollah libanais, avec lequel les Etats Unis ne sont pas en conflit, sauf par l’intermédiaire du régime sioniste.

Les préconisations des services de renseignements US sont tout simplement de bon sens et tôt ou tard, en tout cas progressivement, le gouvernement des Etats Unis sera amené à réaliser où sont ses intérêts, entre défendre une entité qui restera à jamais un corps étranger au Proche Orient, et soutenir les aspirations légitimes des peuples de la région à la paix et à la liberté. Les représentants du sionisme aux Etats Unis ne cesseront bien sûr de proclamer le contraire, mais seul l'avenir (hypothétique) de l'entité sioniste les intéresse.

En réalité, les tractations avec le Hezbollah on déjà commencé, tandis que, en dépit des rodomontades de part et d’autre, les discussions entre l’Iran et les Etats Unis sont une réalité depuis un certain temps.

Tout est dans cet article du Washington Post que je vous propose.

par David Ignatius, Washington Post (USA) 17 mars 2011 traduit de l’anglais par Djazaïri


Dans un monde musulman qui change rapidement, l’administration Obama soupèse la meilleure façon de discuter avec des adversaires comme les talibans et, peut-être, le Hezbollah.
Un modèle pour l’administration, dans sa réflexion sur la prise de contact avec des ennemis, est le processus britannique de dialogue pendant les années 1990 avec le Sinn Fein, l’aile politique légale des terroristes de l’Irish Republican Army (IRA). Cette approche avait permis une percée dans les discussions de paix et un règlement d’un conflit qui faisait rage depuis plus d’un siècle.
Dans le cas des talibans, l’administration a affirmé à plusieurs reprises qu’elle cherchait une solution politique à la guerre en Afghanistan plutôt qu’une solution militaire. Cette formule semble parfois relever de l’incantation avec plus de 100 000 soldats US engagés dans les combats. Mais sa définition s’est précisée avec l’ouverture des portes pour un dialogue élargi par la secrétaire d’Etat Hillary Rodham Clinton.
Dans un discours du 18 février devant l’Asia Society, Clinton a subtilement modifié les conditions d’une participation des Talibans à des discussions de paix. Elle a répété les « lignes rouges pour la réconciliation » définies par l’administration –que les représentants Talibans renoncent à la violence, rejettent al Qaïda et respectent la constitution afghane. Mais au lieu d’en faire des préalables à des discussions, elle a dit que c’étaient  les « résultats nécessaires de toute négociation. »
Pour amener les insurgés Afghans vers la réconciliation, l’administration soutient un plan du président Hamid Karzai qui permettrait aux Talibans d’ouvrir un bureau à Kaboul ou peut-être hors d’Afghanistan, où les contacts seraient plus faciles. L’Arabie Saoudite a été évoquée pour accueillir ce site, mais un lieu plus probable serait la Turquie. Le gouvernement turc réfléchit actuellement à la question.
Des contacts discrets avec certaines personnalités Talibans ont déjà commence, selon un article de Steve Coll dans le New Yorker du mois dernier. Cette fuite a été considérée comme si sensible qu’un officiel soupçonné d’avoir divulgué l’information aurait été réprimandé.
Le principe directeur pour l’administration Obama est que la stratégie politique et diplomatique doit inspirer cette année la politique en Afghanistan, et non être déduite après-coup des opérations militaires. Voici comment la Maison Blanche présente les choses dans son analyse de ses politiques de décembre : « En 2011, nous intensifierons notre diplomatie régionale pour permettre à un processus politique de promouvoir la paix et la stabilité en Afghanistan. »
.Cette approche régionale a déjà donné les Etats-Unis à donner leur aval à deux rencontres sur l’Afghanistan en présence de représentants Iraniens – une à Rome l’an dernier et une à Djeddah en Arabie Saoudite le 3 mars, sous les auspices de la Conférence Islamique.
La question du Hezbollah reste fermée en termes de débat politique. Mais elle a fait l’objet d’une grande attention de la part de la maison Blanche ces dernières semaines en raison d’une nouvelle National Intelligence Estimate (NIE, analyse réalisée conjointement par les divers services de renseignements) en voie d’achèvement sur le Hezbollah.
Les officiels qui ont lu les versions provisoires de l’analyse expliquent qu’elle situe le Hezbollah dans son plus vaste contexte, en tant que force politique et sociale au Liban, en plus de sa milice désignée officiellement par les Etats-Unis comme « organisation terroriste étrangère. » Comme la plupart des NIEs, celle-ci contiendrait un large échantillon de points de vue, certaines analyses insistant sur le rôle politique croissant de l’organisation, dont sa représentation dans le gouvernement libanais.
La bombe à retardement politique dans la NIE est la question de savoir si les Etats-Unis devraient chercher à prendre langue, directement ou indirectement, avec le Hezbollah – du moins avec son aile politique. Des officiels favorables à une telle démarche soutiennent que cette organisation est comme l’IRA ou l’OLP – avec une composante non militaire susceptible d’être intégrée dans un dialogue.
Ces thèses dissidentes sur le Hezbollah ont été formulées publiquement par John Brennan, le conseiller de la maison Blanche en matière de contre terrorisme. En mai 2010, il l’a présenté comme « une organisation très intéressante » et déclaré que les Etats-Unis devraient essayer de « renforcer les éléments les plus modérés. » Et lors d’une conférence en août 2009, il a proposé ce raccourci : « Le Hezbollah a commencé comme une organisation purement terroriste au début des années 1980 et é évolué significativement avec le temps » pour disposer de membres au parlement et dans le gouvernement .du Liban.
Cette discussion à haut niveau sur le Hezbollah illustre ce qui fermente dans la réflexion des Etats Unis sur le Moyen orient qui est transformé par des soulèvements pour la démocratie. Les officiels préviennent que, pour le moment, la question du Hezbollah est un objet d’analyse pour les spécialistes du renseignement, pas pour les décideurs politiques. La maison Blanche admet avoir fort à faire avec la situation actuelle sans avoir à ouvrir une nouvelle question qui produirait des ondes de choc en Israël, en Arabie Saoudite et dans d’autres pays.
L’important est que, après des décennies  de guerres américaines au Moyen Orient, l’administration Obama cherche de plus en plus des voies pour dialoguer avec des adversaires et à les attirer dans un processus de dialogue. Le monde change et la politique des Etats Unis devrait peut-être aussi changer.

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