jeudi 30 août 2012

Sur la tuerie de Deraya en Syrie, traduction express de Robert Fisk


La presse française, c'est globalement de la merde.aux mains des banquiers et des marchands d'armes

Traduction à la va comme je te pousse d’un article de Robert Fisk sur la tuerie de Deraya en Syrie  imputée généralement à l’armée syrienne.
Sans trancher vraiment, Fisk nous montre que les choses sont plus compliquées qu’à première vue et qu’un certain nombre d’indices plaident pour l’hypothèse d’une tuerie perpétrée par les F.F.I. l’Armée Syrienne Libre.
J’ai pris l’article dans The Independent Irlande mais Robert Fisk collabore en ce moment avec The Independent du Royaume Uni (les liens entre les deux journaux sont étroits).
Un fait assez emblématique de la couverture de la crise syrienne est que, en dépit du contenu de l’article, la photo proposée par The Independant (Irlande) pour illustrer l’article comporte une légende qui impute le massacre aux fameuses shabiha, les milices progouvernementales…

Par Robert Fisk, The Independent (Irlande)

La ville syrienne de Deraya où un massacre a été commis est un lieu ou planent fantômes et questions. Ils font écho au grondement des explosions de mortiers et aux tirs d’armes à feu d’hier avec ses quelques habitants rentrant chez eux et parlant de mort, d’agressions, de «terroristes» étrangers, et son charnier hanté par des tireurs embusqués.

Les hommes et les femmes avec qui j’ai pu discuter, deux d’entre eux ayant perdu des proches parents pendant cette journée d’infamie il y a quatre jours, m’ont raconté une histoire différente de celle qui a été reprise dans le monde entier : leur récit était celui d’une prise d’otages par l’Armée Syrienne Libre et de négociations désespérées pour un échange de prisonniers entre les opposants armés au régime et l’armée syrienne, avant que la prise d’assaut de la ville par les forces gouvernementales pour en reprendre le contrôle aux rebelles.

Officiellement, aucune mention n’a été faite de ces discussions entre les deux ennemis. Mais des officiers supérieurs de l’armée syrienne ont expliqué à The Independent comment ils avaient «épuisé toutes les possibilités de réconciliation» avec ceux qui avaient pris la ville, tandis que des habitants de Deraya disent qu’il y a un une tentative des deux côtés pour arranger un échange de civils et des soldats en permission – apparemment enlevés par les rebelles en raison des liens de leurs familles avec l’armée gouvernementale -  contre des prisonniers [de l’ASL] aux mains de l’armée. Quand ces discussions ont été rompues, l’armée est entrée dans Deraya, à 8 kilomètres du centre de Damas.
Etre le premier témoin oculaire occidental dans cette ville hier était aussi frustrant que dangereux. Les cadavres d’hommes, de femmes et d’enfants avaient été déplacés du charnier où beaucoup d’entre eux avaient été découverts ; et quand nous sommes arrivés en compagnie de troupes syriennes au cimetière musulman sunnite – coupé en deux par la rue principale qui traverse Deraya – des tireurs embusqués ont ouvert le feu sur les soldats, touchant l’arrière du vieux véhicule blindé avec lequel nous nous sommes enfuis. Nous avons cependant pu parler avec des civils hors de la portée des officiels Syriens – dans deux cas, c’était dans la sécurité de leurs domiciles – et leur récit de tuerie qui a causé la mort de plus de 245 hommes, femmes et enfants suggère que les atrocités ont été bien plus étendues qu’on ne le supposait.

Une femme, qui s’est présentée sous le nom de Lina, a déclaré qu’elle circulait en ville en voiture quand elle a vu 10 cadavres d’hommes qui gisaient sur la chaussée prés de chez elle. «Nous avons continué à rouler, nous n’osions pas nous arrêter, nous avons seulement vu les cadavres dans la rue,» dit-elle, ajoutant que les troupes syriennes n’étaient pas encore entrées dans Deraya.

Un autre homme a déclaré que, quoiqu’il n’ait pas vu les morts dans la fosse commune, il pensait que la plupart avait un lien avec l’armée gouvernementale avec plusieurs appelés en permission. «Un des morts était un postier – ils l’ont mis dans le lot parce que c’était un fonctionnaire,» déclare cet homme. I ces récits sont vrais, alors les hommes armés – qui portaient des cagoules selon une autre femme qui a raconté comment ils avaient fait irruption chez elel et comment elle les avait embrassés dans la tentative de quelqu’un qui a peur pour les empêcher de tirer sur sa propre famille – étaient des insurgés armés plutôt que des soldats Syriens.

Amer Sheikh Rajab, un cariste, dit que son domicile a été utilisé par des hommes armés comme base pour les forces de « l’Armée Libre,» l’expression par laquelle les civils désignent les rebelles. Ils ont cassé la vaisselle de la famille et brûlé les lits et les tapis – la famille nous a montré les dégâts – mais ils ont aussi retiré des pièces électroniques à l’intérieur des ordinateurs et des téléviseurs qui se trouvaient dans la maison. Pour s’en servir comme composants pour des bombes, peut-être ?

Su une route, à la limite de Deraya, Khaled Yahya Zukari, un chauffeur routier, était en train de quitter la ville dans un minibus avec sa femme, Musreen, 34 ans, et leur fille âgée de sept mois.

«Nous étions en route pour [le faubourg voisin de] Senaya quand soudain il y a eu de nombreux tirs dans notre direction,» dit-il. «J’ai dit à ma femme de se tapir contre le sol mais une balle a pénétré dans le véhicule et a traversé le corps notre bébé et a touché ma femme. C’était la même balle. Elles sont mortes toutes les deux. Les tirs venaient des arbres, d’un espace vert. C’étaient peut-être des militants cachés dans le terrain et derrière les arbres qui pensaient que nous étions un bus militaire qui transportait des soldats.»

Et une enquête approfondie sur une tragédie de cette ampleut et dans ces circonstances était virtuellement impossible hier. A certains moments, accompagnés de soldats Syriens, nous devions foncer dans des rues vides avec des tireurs antigouvernementaux embusqués aux intersections ; de nombreuses familles s’étaient barricadées chez elles.

Même avant notre départ pour Deraya à partir de la grande base militaire de Damas – où se trouvent des chars T-72 et des hélicoptères de combat Hind fabriqués en Russie – un obus de mortier, peut-être tiré depuis Deraya même, s’était abattu sur la piste à à peine 300 mètres de nous, provoquant une colonne de fumée qui s’élevait vers le ciel. Même si les soldats Syriens continuaient à se doucher nonchalamment en plein air, j’ai commencé à éprouver un peu de compréhension pour les inspecteurs de l’ONU chargés de contrôler le cessez-le-feu qui ont quitté la Syrie la semaine dernière.

Le récit peut-être le plus triste de tous est celui que j’ai entendu hier de la part de Hamdi Khreitem, 27 ans, qui a raconté, assis dans la demeure familiale avec son frère et sa sœur, comment ses parents, Selim et Aïcha étaient partis acheter du pain samedi. «Nous avions déjà vu les images du massacre à la télévision – les chaînes occidentales disaient que c’était l’armée syrienne, la télévision d’Etat disait que c’était l’ «Armée Libre» - mais nous n’avions plus à manger et papa et maman sont partis en ville en voiture. Puis nous avons eu un appel de leur téléphone mobile et c’était ma mère qui disait seulement : ‘Nous sommes morts.’ Elle n’était pas morte.

 «Elle était blessée à la poitrine et au bras. Mon père était mort mais je ne sais pas où il a été touché et qui l’a tué. Nous l’avons sorti de l’hôpital, recouvert [d’un linceul] et nous l’avons enterré hier.»

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